Roman: Le livre des Baltimore, ou La vérité sur l'Affaire Goldman
Avec La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert, Joël Dicker avait livré un récit haletant dans lequel la fameuse « vérité » finissait par émerger, après avoir été entrevue, dissimulée, esquissée, ou travestie, pendant des centaines de pages. Le lecteur suivait le narrateur, Marcus Goldman, jeune écrivain newyorkais, dans les méandres d’une enquête aux ramifications complexes et empruntait, à sa suite, un certain nombre de fausses pistes avant de finalement retrouver son chemin.
Le roman était captivant et fascinant. Il y avait la facilité d’écriture de Dicker, son habileté à raconter un même événement de mille façons différentes, la peinture de la vie quotidienne d’une bourgade de Nouvelle Angleterre et des personnages équivoques, dont l’héroïne au centre de l’intrigue, une étudiante au passé trouble tombée amoureuse d’un professeur, beaucoup plus âgé qu’elle et qui avait soudain disparu un soir d’été, vingt-cinq ans plus tôt…
Le nouveau roman de Dicker est également articulé autour d’un certain mystère. Il en est question dès la première page. Mais sa nature ne sera révélée qu’à la toute fin de l’histoire. Le narrateur, qui est le même Marcus Goldman, y fait référence en parlant de « drame », sans jamais en dire plus. Les impatients devront tourner les pages et patienter…
Ce drame concerne une famille américaine, les Goldman, justement. Le roman est leur saga racontée par Marcus, à travers le récit de sa jeunesse. Les Goldman, ce sont alors deux frères, « l’Oncle Saul » et le père du narrateur. L’oncle Saul, une star du barreau, habite une somptueuse demeure à Baltimore avec son épouse « Tante Anita » et leur fils Hillel. Les parents du narrateur occupent une maison plus modeste à Montclair, dans le New Jersey. Les héros de l’histoire sont leurs enfants, des gamins inséparables qui se sont donné le nom de « gang des Goldman ». Il y a Marcus, Hillel, et Woody, un garçon délaissé que Saul et Anita ont adopté. Bientôt il y aura Alexandra, la fille d’un riche voisin dont les trois inséparables tomberont tous amoureux, en secret… L’histoire finira mal et l’on saura que la richesse des uns n’était qu’illusoire, mais que leur soif de reconnaissance aura mené toute la famille à la tragédie…
La facilité d’écriture et de mise en scène de Joël Dicker est toujours intacte. Mais la fascination du premier roman ne fonctionne pas ici. La saga semble un peu longue. Les escapades des adolescents peinent à émouvoir – sauf quelques belles scènes- et l’on finit par n’attendre plus que ce fameux drame pour savoir enfin ce qui a pu justifier tant d’encre déversée.
Dicker sait parfaitement dépeindre la vie américaine, avec ses codes, ses lieux cultes, et les étapes initiatiques qui ponctuent la jeunesse – le lycée, le sport, l’université… Mais il manque une vraie tension dramatique à son récit. Le « gimmick » du « drame » à venir et qu’il annonce à chaque fin de chapitre, ne suffit malheureusement pas à satisfaire l’attente du lecteur.
Le Livre des Baltimore, Joël Dicker, éditions De Fallois, 480 pages, 22 euros