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France-Amérique le blog de Gérald Olivier
31 octobre 2018

Midterms 2018: Comment les Républicains peuvent conserver leur Majorité à la Chambre

 House of Reps logo

Si les Pères Fondateurs des Etats-Unis étaient parmi nous, ils nous diraient que l’élection des membres de la Chambre des Représentants est la plus importante de toutes ! Plus importante même que l’élection présidentielle. Et pour cause ! A l’origine, les Etats-Unis n’avaient pas de président. La fonction n’existait pas. Elle fut créée plus tard. Parce qu’elle manquait. Mais dans l’esprit des Pères Fondateurs l’autorité suprême revenait au Congrès et donc pour moitié à la Chambre des Représentants.

La Chambre des Représentants est la chambre « basse » du Congrès. L’équivalent de  l’Assemblée nationale. Elle compte 435 sièges, renouvelables tous les deux ans. Oui tous les deux ans ! Le mandat d’un représentant aux Etats-Unis est de vingt-quatre mois seulement ! Pourquoi ? Pour souligner que les « élus » se devaient d’être à l’écoute des «électeurs » sous peine de ne pas être réélus… La pratique n’a peut-être pas toujours été à la hauteur de la théorie, mais c’est ainsi.  

 U

Au contraire du Sénat, les sièges à la Chambre sont attribués proportionnellement à la population de chaque Etat. La Californie, Etat le plus peuplé,  compte donc la plus importante délégation, avec 53 représentants. A l’opposé des Etats comme l’Alaska,  le Delaware, le Montana, le Vermont ou le Wyoming, qui ont à peine un million d’habitants,  ont un seul représentant. 

Le  nombre de sièges attribué à chaque Etat est révisé tous les dix ans en fonction du dernier recensement. En 1952 l’Etat de New York avait trente-neuf  représentants, la Floride huit et le Texas vingt-deux. En 2012 New York n’en avait plus que vingt-sept, la Floride autant et le Texas trente-six. Tous les dix ans les limites de districts sont donc redessinées et cette tâche est confiée aux législatures de chaque Etat ! Qui  contrôle la législature tient le crayon et peut se  tailler des districts à sa mesure ! Cela porte un nom aux Etats-Unis, le « Gerrymandering » d’après un élu, justement de New York, qui au XIXe siècle fut le premier  à expérimenter l’art de dessiner des circonscriptions pour garantir la victoire de son parti…

 Midterms 2018 house of representatives 1

Lors du scrutin de 2016, sur les 435 sièges, les Républicains en ont remporté 241 contre 194 aux Démocrates. Il faut 218 sièges pour avoir la majorité absolue. Les Démocrates ont donc besoin d’un gain net de 24 sièges pour obtenir cette majorité.

Sur le papier, c’est très jouable. Les circonstances sont favorables aux Démocrates. Pour deux raisons. La première est qu’historiquement, le parti au pouvoir à la Maison Blanche est battu lors des élections de mi-mandat. Donald Trump étant Républicain, son parti devrait perdre des sièges.  La seconde raison est qu’en moyenne vingt-neuf sièges basculent en faveur de l’opposition  à chaque scrutin. Donc si les traditions sont respectées, les Démocrates devraient le 7 novembre au matin contrôler la chambre avec une majorité d’une  dizaine de sièges,  225 contre 210 aux Républicains... D’ailleurs le site d’analyse politique « Five-Thirty-Eight » donne 86% de chances aux Démocrates d’emporter la majorité.

Dans la pratique, et dans le contexte actuel, parvenir à cette majorité ne sera toutefois pas si simple. Et le réconfort évident des Républicains est que, voici deux ans, les mêmes sondages donnaient à Hillary Clinton autant de chances de l’emporter…

Il semble acquis que les Démocrates vont gagner quelques sièges. La question est de savoir combien. Au printemps, les médias annonçaient une « vague bleue », c’est-à-dire une large victoire du parti démocrate, un gain de 60 sièges à 75 sièges… Au fil des jours cette vague s’est considérablement réduite.

Midterms 2018 maps of battlegrounds

Selon les derniers sondages une trentaine de sièges, pas plus,  seraient encore « incertains ». Le site RCP (Real Clear Politics) estime ainsi que 204 sièges sont acquis aux Démocrates et  200 aux Républicains. Restent 31 scrutins indécis, qualifiés de « Toss up » en anglais.  Vingt-huit de ces trente-et-un sièges sont actuellement détenus par un Républicain, et seulement trois par un Démocrate. En clair les Républicains sont plus exposés. Et avec 204 sièges déjà acquis une victoire dans quatorze de ces vingt-huit districts suffirait à donner aux Démocrates la majorité qu’ils espèrent. A l’inverse si les Républicains parviennent à préserver un siège sur deux ou plus, ils sauvent leur majorité. C’est parfaitement possible.

Sans passer en revue toutes les batailles, voici ce qu’il faudra suivre durant les derniers jours de la campagne et le jour du scrutin pour comprendre cette élection.

Première consigne, suivre la participation électorale.

 Midterms 2018 early voting

Traditionnellement les Américains se mobilisent  moins pour des élections de mi-mandat que pour une élection présidentielle. Et traditionnellement les Républicains se mobilisent plus que les Démocrates. Une forte participation serait donc à l’avantage des Démocrates. Avantage « relatif », cependant. Les deux camps ont réussi à mobiliser leurs troupes bien au-delà de la normale. Côté démocrate il s’agit à la fois d’effacer l’affront de 2016, et de bloquer l’agenda de Donald Trump. Côté Républicain, il s’agit très exactement de l’inverse : démontrer que 2016 n’était pas un accident de l’histoire mais le début d’une profonde révolution, et permettre à Donald Trump de poursuivre sa tâche en préservant sa majorité… Pour les Républicains, même si les élections à la Chambre sont des élections locales, leur portée est nationale, et l’enjeu est la possibilité pour Donald Trump d’exercer le mandat qui lui a été confié il y a deux ans. Trump est plus populaire que jamais au sein de l’électorat républicain, un électorat qui ne dit pas toujours aux sondeurs ce qu’il pense et qui se méfie des grands médias, pourvoyeurs de « fake news ». Le 6 novembre pourrait donc réserver des surprises et la cote de nombreux candidats républicains est sans doute sous-évaluée.

Deuxième consigne : suivre la Côte Est.

Par le simple fait du décalage horaire les bureaux de vote ferment plus tôt sur la côte Atlantique que sur la côte Pacifique. Les premières indications proviendront des Etats de la Côte Est. Le résultat des batailles données comme indécises apportera une première indication de la tendance générale.

 Midterms 2018 Maine battle Golden vs Poliquin

Un petit Etat de Nouvelle Angleterre, le Maine, sera le premier sous le feu des projecteurs. Cet Etat ne compte que deux représentants, un démocrate et un républicain aujourd’hui. Mais dans le second district le sortant républicain, Bruce Poliquin est menacé par un Démocrate de 35 ans, Jared Golden, ancien Marine. Le district a voté Trump en  2016 et une défaite de Poliquin serait de mauvaise augure pour les troupes de Donald Trump.

Beaucoup plus bas sur la carte, en Floride, huit sièges sont actuellement indécis (toss up) dont sept détenus par des Républicains. Le sort de ces sièges sera déterminant.

 Midterms 2018 Florida Muscarsell vs Curbelo

Sur ces sept sièges, deux se trouvent dans des districts remportés par Hillary Clinton en 2016. Dont l’un avec une marge de 20%. Celui-là est déjà considéré comme perdu pour les Républicains, d’autant que le sortant ne s’est pas représenté. Les deux candidats en lice sont deux femmes, Donna Shalala pour les Démocrates et Maria Salazar pour les Républicains. Shalala est donnée vainqueur à 80%.  L’autre siège est plus contesté. Là, le Républicain sortant Carlos Curbelo, affronte une autre femme Debbie Mucarsell-Powell, dans un district remporté de seize points par Hillary Clinton. Les deux candidats sont au coude à coude. Le vainqueur pourrait n’être connu que très tard et après recomptes. Mais tout écart par rapport aux prédictions sera porteur de sens.

Sur l’ensemble de la Floride,  les Républicains  possèdent aujourd’hui 15 sièges, contre  11 aux Démocrates et un vacant. S’ils venaient à perdre un siège, voire deux, ils seraient sans doute satisfaits. Toute perte supplémentaire serait le signe d’une sale nuit en perspective. A l’inverse si les Démocrates ne gagnent aucun siège en Floride, c’est pour eux que la soirée sera longue et pénible…

Midterms 2018 North Carolina Manning vs Budd 

En Caroline du Nord, deux sièges républicains sont menacés. Dans le 9e district, deux nouveaux venus s’affrontent, le Républicain Mark Harris et le Démocrate Dan Mc Creary. Les sondages les donnent à égalité et le résultat sera serré. Dans le 13e district le Républicain sortant Tedd Budd est talonné par la challenger démocrate Kathy Manning. Ces deux districts ont voté Trump en 2016 et deux victoires républicaines sont attendues. Si l’un ou l’autre de ces sièges basculait,  les Démocrates y verraient une victoire  significative.

Midterms 2018 House New Jersey Malinowski vs Lance 

Dans le New Jersey, autre Etat de la côte Est, quatre sièges sont indécis, dont trois détenus par un Républicain et un seul par un Démocrate. Là encore le résultat donnera la tendance pour la soirée. A suivre en particulier, le 5e district. Si le candidat démocrate, Josh Gottheimer était battu, les Républicains y verraient une victoire significative.  Au contraire si le sortant Républicain Léonard Lance était battu dans le 7e district, ce serait un coup sérieux porté à leur chance de préserver leur majorité à la Chambre…

Idem dans l’Etat de New York. Quatre Républicains sont en difficulté. Si les Démocrates prennent ces quatre sièges ils seront sans  doute en route vers la majorité. Si les Républicains limitent leur perte, voire sauvent ces quatre sièges,  ils resteront vraisemblablement maîtres de la Chambre …

En Virginie, dans le 7e district, le sortant David Brat affronte la jeune démocrate Abigail Spanberger. Il doit sauver son siège.

En Pennsylvanie, dans le 1er district un autre Républicain, Brian Fitzpatrick est sur la sellette. S’il l’emporte face à Scott Wallace, son challenger démocrate, les Républicains marqueront des points.

Ensuite il faudra attendre les résultats de la Californie pour être vraiment fixé. Car pas moins de sept sièges de Républicains sont menacés. Il s’agit pour le parti de limiter les dégâts.

Car les Républicains ne peuvent guère compter sur des gains de sièges dans cette campagne. Seuls trois sièges détenus par un démocrate sont vulnérables, l’un dans le Minnesota, les deux autres dans le Nevada, deux Etats « bleus », c’est-à-dire favorables aux Démocrates.

Troisième consigne : suivre les scrutins sans candidat sortant.

Le pouvoir du titulaire est considérable lors des élections au Congrès. Les sortants ont l’avantage d’être connus, et ont accès à des financements plus importants. Défier et battre un candidat  sortant est difficile et rare. Le plus souvent les sièges basculent lorsque les sortants ne se représentent pas et que deux nouveaux venus s’affrontent. La force de mobilisation d’un parti se mesure donc à sa capacité à conserver un siège dans cette éventualité.

En 2018 pas moins de trente-sept élus Républicains ne se représentent pas, contre seulement dix-huit Démocrates. Ce sont donc dix-neuf chances supplémentaires qu’ont les Démocrates de gagner des sièges. Les circonstances dans ce domaine jouent en leur faveur.

Quatrième consigne, suivre le président.

 Donald trump-rally-texas-2

En 2016 Donald Trump acheva sa campagne électorale par des détours dans le Wisconsin, le Michigan et la Pennsylvanie, trois Etats loin d’être acquis mais qu’il remporta sur le fil ce qui lui ouvrit le chemin de la Maison Blanche. En 2018 Donald Trump a prévu de se déplacer en Floride, en Géorgie, au Tennessee, dans le Missouri, en Virginie de l’Ouest, dans l’Ohio et l’Indiana et enfin au Montana ! Huit Etats entre le 31 octobre et le 5 novembre ! Même ses détracteurs les plus virulents reconnaissent à Donald Trump un instinct politique fort. Il n’a pas choisi ces Etats au hasard, mais parce qu’il s’agit d’Etats importants où sa présence peut faire la différence.  Ce sont aussi des Etats où se déroule une importante élection sénatoriale. La Maison Blanche a peut-être privilégié la chambre « haute »…

Cinquième et  dernière consigne, suivre l’argent ! 

 Miterms 2018 spending skyrocketting

Au-delà des sondages qui apportent une série d’instantanés sur l’état d’esprit des électeurs, le meilleur moyen de connaitre le rapport de force dans une bataille électorale est de regarder l’argent que les grands partis investissent. Lorsqu’un candidat est en difficulté, il peut bénéficier de fonds supplémentaires. Si, au contraire, le parti lui coupe les fonds, c’est qu’il a fait une croix sur ses chances de victoire et préfère placer son argent ailleurs, sur quelqu’un d’autre.

Dans sa globalité, la campagne 2018 restera comme la plus chère de l’histoire. Jamais les deux partis n’ont  dépensé autant d’argent pour un scrutin de mi-mandat : 5,2 milliards de dollars selon le Center for Responsive Politics, soit un milliard de dollars de plus qu’en 2014.  Cela seul en dit très long sur l’enjeu du scrutin. Au 29 octobre, soit à une semaine de la fin de la campagne, les Démocrates avaient dépensé plus que les Républicains, 2,5 milliards contre 2,2 . Mais les Républicains possédaient une réserve de fond plus importante pour les derniers jours. L’argent des Républicains est allé d’abord aux dix scrutins sénatoriaux les plus serrés (voir post précédent « Pourquoi le Sénat restera Républicain) . L’argent des Démocrates est allé au contraire aux candidats pour la chambre des Représentants.

Miterms 2018 campaign spendings

 

Deux batailles sortent ainsi du lot. Dans le New Jersey, le challenger démocrate Tom Malinowski a bénéficié de fonds très importants dans sa campagne contre le Républicain Léonard Lance. Tout comme  le démocrate M. J. Hegar, un ancien pilote d’hélicoptère de l’armée qui tente de renverser le Républicain John Carter en place depuis quinze ans dans le 31e district du Texas… On saura le 7 novembre si cet argent a été bien investi ou pas… ?  

En résumé les Démocrates sont largement favoris pour remporter ce scrutin mais la question demeure de savoir si leurs gains seront suffisants pour leur donner la majorité. L’enjeu est évidemment de taille car le parti majoritaire à la Chambre contrôle la direction de ses commissions et contrôle l’agenda législatif. De quoi tuer dans l’œuf les réformes souhaitées par Donald Trump et enquêter à loisir sur ses agissements, ceux de sa famille, et de ses proches, voire engager une procédure de destitution.

Le scrutin reste serré. Une majorité Démocrate  n’est pas garantie. Surtout face à une forte mobilisatoin des Républicains. Par ailleurs l’ensemble des données considérées pour établir les prévisions de résultats, repose sur des sondages d’opinions, dont on a vu en 2016 qu’ils pouvaient passer totalement à côté de la réalité. La marge d’erreur des sondages américains est de 2 à 3 points. Amplement suffisant pour que les Républicains sauvent leur mise, si cette marge s’avère en leur défaveur.

 

 

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