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France-Amérique le blog de Gérald Olivier
19 juillet 2024

J.D. Vance, successeur désigné de Donald Trump

Donald Trump a désigné J.D. Vance pour être son vice-président. Un choix qui fait du jeune sénateur de l’Ohio bien plus que le colistier de l’ancien président.  Il en fait son héritier et successeur.

Ce choix n’est pas une surprise. Vance était régulièrement mentionné pour se voir offrir le job. Au matin de sa désignation les médias le plaçaient dans le dernier trio avec le sénateur de Floride Marco Rubio et le gouverneur du Nord -Dakota Doug Burgum ; (Voir mon post du 12 juillet « Qui sera la vice-président de Trump : six candidats en revue » ). 

Ce choix est néanmoins audacieux. Vance est jeune et son expérience est très limitée. Mais il a du charisme, il est déjà connu, et il épouse parfaitement la ligne politique de l’ancien président

Par ce choix Donald Trump indique qu’il regarde déjà au-delà de son propre mandat. Il s’est choisi un héritier. Quelqu’un capable de reprendre le flambeau du « trumpisme » à partir de 2028, quand lui-même devra inévitablement se retirer. Vance est un peu son fils spirituel adoptif.

Vance est issu de l’Amérique profonde, celle pour laquelle Trump se bat. Il connait les peines et les aspirations des électeurs de Donald Trump. Son parcours est le récit vivant de comment il est possible à cette Amérique de relever la tête et par la même de rendre au pays « sa grandeur », c’est-à-dire le sortir de la spirale décliniste où les Démocrates le plongent depuis des années, voire des décennies…

James David Vance est né le 8 août 1984 à Middletown, dans l’Ohio. Ronald Reagan achevait son premier mandat. Joe Biden était sénateur depuis douze ans déjà.

Il se décrit comme un « hillbilly », un habitant des collines, au fin fond de l’arrière-pays.  Plus familièrement, on dirait un « plouc ». Sa ville de naissance est une bourgade de cinquante mille habitants, à mi-chemin entre Cincinnati et Dayton. D’où son nom Middletown, « la ville au milieu ».

Ses parents divorcèrent quand il était encore un bébé et lui et sa sœur furent élevés principalement par leurs grands-parents, originaires du Kentucky et qui n’avaient jamais abandonné leur culture rurale. Sa mère « Bev », pour Beverly, avait des problèmes avec l’alcool, la drogue et les hommes…

Adolescent dans les années 1990 et 2000 Vance observa ses congénères se préparer à une vie de col bleu résigné au sein de l’aciérie locale, une usine américaine récemment rachetée par une entreprise japonaise. Lui avait d’autres ambitions. Comme de faire des études, quitte à devoir quitter le nid familial et la région.

Puis survint le 11 septembre 2001. Vance voulut prendre part au sursaut patriotique qui suivit les attentats. Il ne connaissait rien du monde. Mais des terroristes du Proche-Orient avaient attaqué son pays et il estimait de son devoir de le défendre. C’est pour cette raison qu’à dix-neuf, à la sortie du lycée, il s’engagea dans l’armée américaine, avec les Marines.  « Tu seras mal payé et tu seras peut-être envoyé à la guerre, mais ils feront de toi un homme discipliné et tu apprendras à commander, » lui avait dit le sergent recruteur.

C’est ce qu’il advint. Après son « boot camp », il fut déployé en Iraq. Doué par les lettres, il devint correspondant de guerre.

Cette expérience sera formatrice. Elle a construit sa vision du monde et alimenté sa méfiance vis-à-vis de la politique étrangère formulée par les hauts fonctionnaires du département d’Etat. Une politique marquée par l’ignorance et la naïveté. Ignorance des réalités du monde. Naïveté sur la capacité des Etats-Unis, pays vieux d’à peine deux siècles et demi, à changer les mentalités de cultures multimillénaires.

Alors qu’il y aurait tant à faire à l’intérieur des Etats-Unis. Un sentiment que Vance a résumé dans son discours devant la convention républicaine par la formule :  « A partir des années 2000, les emplois ont été envoyés à l’étranger et les jeunes Américains ont été envoyés à la guerre. »

Une véritable trahison du peuple par les élites.

Après quatre ans de service au sein de Marines, il put bénéficier d’une bourse d’Etat pour financer ses études. Une licence à Ohio State, l’université publique d’Etat, et des études de droits à la prestigieuse université privée de Yale, l’antichambre des administrations américaines.

Vance venait de sortir de son ornière. Mais il se sentait toujours un « hillbilly » et retourna d’abord chez lui pour aider sa communauté auprès de divers élus locaux. Puis il prit la route de la Silicon Valley, lever des fonds pour financer des start-ups. C’est ainsi qu’il se lia avec Peter Thiel, entrepreneur co-fondateur de Paypal, entre autres, et conservateur,  tendance libertarien, dans l’âme. En clair, Thiel est un défenseur des libertés individuels, et un pourfendeur de l’interventionnisme gouvernemental.

Une enseignant de Yale avait recommandé à Vance de raconter son parcours. Il le fit dans un livre intitulé « Hillbilly Elegy ». Plus qu’une autobiographie, le livre est le portrait d’une communauté, tombée victime des délocalisations, de la mondialisation et de l’abandon des élites, parce que trop blanche et trop religieuse. Le livre, paru en 2016 connut un énorme succès et Vance devint la coqueluche des médias.

2016 était l’année de l’émergence et de la victoire inattendue de Donald Trump à l’élection présidentielle. Et Vance, dans son livre, était le premier à parler de ses électeurs et à expliquer les raisons de sa victoire. Or à l’époque, Vance n’avait aucune admiration pour Trump. Au contraire il ne l’aimait pas, ne lui faisait pas confiance et ne se cachait pas pour le dire. « Je suis un jamais-Trump » (« never-trumper »), disait-il « Je n’ai jamais aimé ce type ».  En fait il ne le connaissait pas et réagissait au Trump dépeint par les grands médias.

Il mettra deux ans à changer d’avis. Convaincu par la réalité des faits.   «Je ne pensais pas qu’il ferait un bon président, mais je me trompais. » Devant la politique du président Trump et notamment sa défense des industries américaines et des emplois manufacturiers américains par l’imposition de tarifs douaniers sur les produits issus des délocalisations, Vance devient un ardent défenseur du 45e président. Il se liera aussi avec le fils ainé de Trump, Donald Jr, plus vieux que lui de quelques années.

En 2019 Vance se convertit au catholicisme. Elevé dans la foi protestante évangélique, comme beaucoup de sudistes américains Vance est passé par une période d’athéisme avant de retrouver la foi. Il trouve son inspiration mystique dans Saint Augsutin.  « Deux amours ont bâti deux cités : l'amour de soi jusqu'au mépris de Dieu, la cité de la Terre ; l'amour de Dieu jusqu'au mépris de soi, la cité de Dieu. » Un texte du cinquième siècle qui parle encore à cet homme du vingt-et-unième.

Peter Thiel l’a également introduit à la pensée de René Girard, philosophe chrétien né en France et devenu le plus illustre professeur de l’Université de Stanford en Californie. Vance comprend instinctivement la puissance du « désir mimétique » comme source de conflits, ainsi que le recours expiatoire au « bouc émissaire » commun à de nombreuses sociétés. Il voit dans la religion catholique et le sacrifice de Jésus lors de la crucifixion, la volonté d’endosser ce rôle de « bouc émissaire » afin qu’il soit source de paix. Là est l’essence de sa conversion.

Toujours Encouragé par Thiel, Vance a fini par monter sa propre compagnie d’investissement Narya Capital. Une référence au Seigneur des Anneaux de Tolkien (écrivain  anglais catholique et pacifiste) . Narya est un anneau qui permet à celui qui le porte de résister à la tyrannie…

Il se tourne aussi vers la politique, convaincu que des millions d’Américains rejettent en leur for intérieur la politique « woke » et belliciste des élites, mais qu’ils sont ignorés, voire méprisés par des politiciens et des médias acquis à la vision des élites. Pour lui, il y a aux Etats-Unis une majorité conservatrice, patriote et religieuse, rendue invisible et inaudible, simplement parce que ses idées déplaisent. Mais cette majorité silencieuse est bien là et elle peut s’exprimer par les urnes.

La défaite de Donald Trump en 2020 ne le décourage pas, au contraire ? Vance se range derrière le président Trump pour dénoncer une élection, « volée ». Ce qui lui vaut d’être instantanément banni par les médias progressistes. Ceux-là même qui l’avaient adulé pour son portrait sans concession, mais plein de compassion, de l’Amérique profonde, le dénoncent soudain comme le diable personnifié. Pour eux, Vance est devenu le suppôt du Satan de la politique américaine, Donald Trump.  Son alter-égo en plus jeune et sans l’exubérance verbale, ce qui le rend encore plus dangereux. Désormais Vance sera qualifié « d’ultra-conservateur ». Sans préciser ce qu’il y a « d’ultra chez lui. On en parlera même comme du leader d’une « nouvelle droite », dont les contours sont mal définis, mais qui constiturait une « menace contre la démocratie ».

Donald Trump  Jr convainc son père de soutenir Vance dans sa quête du siège de sénateur de l’Ohio. Troisième dans les sondages pour la primaire républicaine, Vance bondit à la première place quand Trump endosse sa candidature. Il l’emporte largement en novembre et devient l’un des sénateurs républicains les plus en vue du fait de sa proximité avec Trump qui a déjà indiqué son intention d’être à nouveau candidat à la Maison Blanche en 2024.

Vance est le fer de lance de ce que certains appellent le  «nationalisme conservateur ». Il reprend largement les principes énoncés de manière empirique par Donald Trump pour en faire un crédo pour l’Amérique du 21 e siècle.

Voici les cinq principes fondateurs de ce « nationalisme conservateur » américain :

Un,  les Etats-Unis doivent recouvrer leur souveraineté nationale par un arrêt total de l’immigration clandestine, et une immigration légale qui souligne le besoin d’assimilation.

Deux,  les Etats-Unis doivent placer l’intérêt de leurs concitoyens avant celui des citoyens d’autres nations et exercer « réalisme et restriction » dans leur politique étrangère. En clair l’aventurisme guerrier appartient au passé. Le nationalisme conservateur s’oppose à la fois à l’impérialisme et à la globalisation.

Trois,  la propriété privé et la liberté d’entreprendre dans un marché ouvert, sont les meilleurs garants de la prospérité économique d’une nation. Les excès de la mondialisation obligent néanmoins les gouvernements à se montrer vigilants et conduire une politique économique qui préserve l’intérêt de leurs industries et leurs concitoyens.

Quatre : la famille, les valeurs traditionnelles et la religion doivent être remises au centre de la société. Les dérives autour du genre doivent être combattues. Il n’existe que deux sexes, mâle et femelle.  L’idéologie LGBT+ est un dangereux poison moral qui sape la société.

Cinq : la méritocratie doit reprendre ses droits naturels sur l’idéologie « woke » et la promotion du DEI (« Diversité, Equité, Inclusion) qui, sous couvert de progrès social, attise les divisions, promeut le racisme et engendre le déclin. Le progrès social résulte de l’encouragement à l’excellence, il ne peut venir d’une division arbitraire des rôles et des richesses.

Certains Républicains ont critiqué les positions de Vance en politique étrangère et en économie. Ils les jugent trop isolationnistes et trop protectionnistes.  Notamment lorsqu’on les contraste avec les positions de Ronald Reagan, qui reste le père spirituel du parti Républicain. Mais ils oublient que Reagan était président il y a quatre décennies, en pleine Guerre Froide, et alors que la Chine, à peine sortie du maoïsme, occupait un rang économique dérisoire.

Ce monde a disparu. Les Etats-Unis ont remporté la Guerre Froide, au nom du monde libre, marquant la défaite de l’Union soviétique et l’élimination de la menace communiste. La Chine est en passe de détrôner les Etats-Unis comme première économie mondiale dans un monde marqué par l’émergence de concurrents régionaux (Brésil Inde, Corée du sud, etc) Bref, le monde est redevenu multipolaire et l’ère où les Etats-Unis devaient assumer seul le rôle de gendarme du monde est révolue. Vance renvoie en fait le parti républicain à ses racines plus anciennes, celles de Robert Taft, (sénateur de l’Ohio, de 1938 à 1953) et Calvin Coolidge (président américain de 1923 à 1929). Et il n’est pas sans rappeler un autre chef de file du  parti Républicain, Pat Buchanan.

 

Ainsi J.D. Vance possède deux grands atouts. Un, il offre un chemin à la poursuite du « trumpisme », au-delà de Donald Trump. Deux, il a une vraie vision de l’Amérique de demain et de son rôle dans le monde. N’en déplaise aux esprits chagrins de gauche pour qui le trumpisme n’attire que les citoyens sans éducation, ni culture, Vance possède les deux. C’est un intellectuel autant qu’un entrepreneur.

D’autres chefs de file du parti Républicain, peuvent toutefois aussi prétendre au rôle d’héritier du trumpisme.  Ron De Santis, le gouverneur de la Floride, est de ceux-là. Il est plus que probable qu’en 2028, ces deux hommes, qui n’ont que six ans d’écart, se disputent la couronne…  

En attendant Vance constitue un excellent choix pour la campagne 2024. Voici pourquoi.

1 - Il est jeune et apporte un équilibre au ticket républicain. A 40 ans, le 8 août prochain il a vingt ans de moins que Kamala Harris. Il appartient à la génération des « millenials », la première génération à avoir grandi à l’ère digital et il est capable d’attirer le vote des 18-45 ans.

2- Son histoire est édifiante. Vance est une tête d’affiche sur le meilleur de ce que l’Amérique peut susciter. Ses origines très modestes et un environnement familial perturbé ne l’ont pas empêché de réussir sur les plans professionnel et personnel. Mais cette réussite est le fruit de ses choix et de ses efforts. Il incarne les vertus conservatrices de persévérance et de refus de la fatalité.

3 – Il est charismatique et sa personnalité rayonne en public, comme à la télévision. Vance possède cette rare capacité à attirer la lumière et à renvoyer de l’énergie. C’est un atout pour la campagne.

4 – Il connait personnellement les maux qui marquent l’Amérique, et il a vécu l’expérience de millions de cols bleus dont les emplois ont été délocalisés et qui n’ont pas pu ou pas su s’adapter. Il est capable de les rassembler quelle que soit leur affiliation politique.  

5- Il est originaire du Midwest et plus particulièrement de la « ceinture de rouille », les vieux Etats industriels vieillissant et sa mission sera de rallier les électeurs des trois Etats décisifs de cette région, la Pennsylvanie, le Michigan et le Wisconsin. S’il y parvient il aura justifié sa désignation.  

6 – Il a une expérience des affaires et du grand capital. Il s’est considérablement enrichi dans la Silicon Valley en aidant de jeunes entreprises, des « start-ups » comme on les appelle, a trouver les fonds pour financer leur développement. C’est l’un des rares conservateurs à être à l’aise dans ce milieu plutôt progressiste et sa capacité à y lever des fonds est un atout supplémentaire pour la campagne.

7 – Son expérience militaire et son déploiement en Iraq en 2004, lui donnent une vraie légitimité en politique étrangère, en particulier sur le sujet de l’interventionnisme américain.

8 – Avec deux ans à peine d’expérience au Sénat, il est, tout comme Trump un véritable « outsider ». Il ne doit rien au système. Au contraire. Le succès de son livre l’avait introduit dans les cercles intellectuels bienpensants  à New York et Hollywood. Par son engagement politique il a tourné le dos à cette élite progressiste, leur préférant le petit peuple américain et ses vrais problèmes.

9 – Son épouse est une Américaine d’origine indienne. Elle s’appelle Usha Chilukuri et a grandi à San Diego, en Californie. Ils se sont rencontrés à Yale. Elle est avocate comme lui et ils ont trois enfants, preuve que Vance n’est pas contre l’immigration quand celle-ci est légale.

10 – Il s’exprime avec facilité et clarté. Bien mieux que Biden et surtout mieux que Kamala Harris. Un débat face à la vice-présidente en place tournerait sans doute à son avantage et les Républicains s’en réjouissent à l’avance.

Si toutefois c’est bien elle qui sera, en définitif, candidate à la vice-présidence… Car côté Démocrates l’incertitude règne plus que jamais quant au « ticket ». Joe Biden pourrait annoncer qu’il renonce à tout instant !

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Commentaires
P
Merci pour ce très beau et très complet portrait de J.D. Vance que je ne connaissais pas du tout. Je suis touché par sa conversion au catholicisme. Elle en dit long sur sa capacité d'ouverture et sa solidité morale. Avec lui, l'avenir de la réforme entreprise par Trump est assurée pour le plus grand bien des États-Unis.
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