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France-Amérique le blog de Gérald Olivier
22 août 2024

Kamala Harris, Chicago et la métamorphose des cloportes

Une drôle de chose est arrivée à Kamala Harris et au parti Démocrate entre Washington et Chicago. Washington c’est leur lieu de résidence et de travail, car les Démocrates occupent la Maison Blanche et dirigent les Etats-Unis depuis 2021. Chicago, c’est la ville du « midwest » où ils viennent de tenir leur convention nationale et de faire de Kamala Harris leur candidate pour l’élection présidentielle du 5 novembre.

L’affaire s’est conclue le 22 août, après quatre jours de discours élogieux d’où il ressort que si Kamala Harris l’emporte, tout ira mieux et l’Amérique pourra (enfin) réaliser sa promesse. Le problème, c’est qu’elle est déjà élue ! Elle est la vice-présidente. Voilà quatre ans qu’elle seconde le président Biden. Elle gère les dossiers les plus chauds, participe à toutes les réunions importantes, visite les grandes capitales internationales, Et avant cela elle était sénatrice de Californie.

Mais tout cela a été mis de côté, effacé, oublié. C’est une Kamala Harris toute nouvelle et toute belle, véritablement métamorphosée, qui a été présentée à Chicago. Venus sortie des eaux. Les Démocrates ont réalisé la prouesse de faire croire aux Américains que leur candidate vient de débarquer sur la scène politique et qu’elle incarne le changement, alors qu’elle est déjà dans la place. La sortante c’est elle ! La candidate de la continuité, c’est elle.

Combien de temps les électeurs se laisseront-ils aveuglés par cette poudre aux yeux ? Combien de temps accepteront-ils de se laisser berner ?  Si l’illusion persiste jusqu’au scrutin, les Démocrates auront réussi un fabuleux tour de passe-passe. Mais si l’illusion se dissipe et si les électeurs distinguent la réalité derrière le voile de fiction qu’on agite sous leurs yeux, la chute risque d’être rude.

Voila ce que les délégués réunis à Chicago et les Américains devant leur télévision ont entendu au sujet de Kamala Harris :

Joe Biden, président des Etats-Unis : « Choisir Kamala, comme colistière (en 2020) fut la meilleure décision de toute ma carrière politique, »

Alexandria Occasio-Cortez, représentante de New York (gauche radicale) : « Nous avons une opportunité rare et merveilleuse d’élire un président qui défendra la classe moyenne parce qu’elle vient de la classe moyenne et qu’elle sait ce que le coût d’un loyer, de commissions et de médicaments représente. »

Hillary Clinton, ancienne secrétaire d’Etat et ancienne première Dame : « Elle va briser un plafond de verre et permettre à des milliers d’entre nous (les femmes) de faire de même. »

Bill Clinton, ancien président : « Elle va apporter des solutions à nos problèmes…  Elle va saisir les opportunités, apaiser nos craintes, s’assurer que tous les Américains ont une chance de réaliser leurs rêves. »

Michelle Obama, ancienne première Dame :  « Kamala Harris est parfaitement préparée pour devenir présidente.  Elle est l’une des personnes les plus qualifiées pour la fonction…  Et l’une des plus dignes… Car son histoire, c’est mon histoire et c’est votre histoire. »

Barack Obama, ancien président : « Elle est prête pour le job  car elle a consacré sa vie à se battre pour les autres… Elle vous voit et elle vous entend et elle se lèvera tous les matins pour se battre pour vous. » Et de conclure « Yes she can » (« Oui,  elle peut») en écho à son propre slogan de 2008 « Yes we can ».

Nancy Pelosi, ex-spekaer de la Chambre des Représentants: « Elle va nous emmener sur des hauteurs jamais atteintes… C’est une leader forte, sage et éloquente. »

Tim Walz, gouverneur du Minnesota et colisiter de Kamala Harris: « Du temps où elle était procureur de district, puis procureur d’Etat, puis sénatrice, puis vice-présidente ,elle n’a cessé de se battre du côté du peuple américain… Et elle n’a jamais hésité à tendre la main à l’autre camp s’il s’agissait d’améliorer votre vie …Qui que vous soyez Kamala se battra pour défendre votre droit de vivre votre vie… et elle le fera avec énergie et dans la joie »

A noter que dans ce concert de louanges, seul  Tim Walz osa évoquer précisément les étapes de l’ascension politique de Kamala Harris. Les autres restèrent dans le flou artistique. Un flou qui pose problème, car pas un seul des compliments empilés par ces sycophantes de circonstance n’est justifié et pas un seul des traits de personnalité évoqués ne correspond à la réalité. Le portrait de Kamala Harris composé à Chicago ne ressemble en rien à la vraie Kamala, celle que tout un chacun a pu observer au cours de ses années de vie publique, en Californie puis à Washington.

La vraie Kamala Harris est une tout autre personne, ambitieuse, déterminée et calculatrice. .

Ambitieuse d’abord. Toute jeune, elle s’est engagée dans une liaison amoureuse avec un homme politique deux fois plus âgé qu’elle, juste le temps qu’il lui mette le pied à l’étrier. Il s’appelait Willie Brown et présidait l’assemblée de Californie. Il avait 60 ans, elle 30. Ils formèrent un « power couple » très « glamour » à l’aube des années 1990 à San Francisco.  Il est fier de l’avoir lancée en politique et ne cache à personne cette relation. Elle affirme au contraire ne rien lui devoir. Les photos et récits de journaux sont là pour prouver le contraire.

Procureur de Californie elle a refusé de requérir la peine de mort contre l’assassin d’un policier, préférant consacrer son énergie à enquêter contre la société ExxonMobil soupçonnée de tromper le public sur la crise du climat et les énergies fossiles.

Déterminée. Au Sénat, c’est par son expérience de procureur qu’elle s’est distinguée. Membre de la Commission judiciaire, elle a confronté le juge Kavannah, nommé par le président Trump à la Cour Suprême, comme s’il était un violeur en série, sur la seule foi d’accusations proférées par une femme, 35 ans après les faits, et qu’aucun témoin n’est venu corroborer. Mais quelques mois plus tard, quand une autre femme a accusé Joe Biden d’attouchements impropres (une conduite maintes fois observée chez lui) elle a refusé de croire l’accusatrice…

En 2019,  en campagne pour la nomination présidentielle démocrate, Kamala a  mis en avant ses positions progressistes : elle s’est dit favorable à la décriminalisation de l’immigration clandestine ; à la suppression de ICE ( Immigration & Customs Enforcement) la brigade chargée de traquer les clandestins pour les renvoyer chez eux ;  à une assurance santé universelle ; à l’interdiction du "fracking", la fracturation hydraulique ; à une hausse de l’imposition sur les riches et sur les corporations. Loin d’être quelqu’un capable de « traverser l’allée » pour trouver un compromis avec l'autre camp,  comme l’a prétendu Tim Walz, elle a reproché à Joe Biden d’avoir travaillé avec des politiciens du Sud favorables à la ségrégation (politiciens Démocrates, au passage).

Calculatrice enfin. En juin 2020, devenue la colistière de ce même Joe Biden - comme quoi elle lui avait pardonné ses errements passés – elle a encouragé les émeutiers qui brulaient alors les centres des grandes villes américaines pour protester contre la mort de George Floyd à Minnéapolis, à poursuivre leurs actions. Elle s’est dit favorable à ne plus financer la police, et elle a levé des fonds pour payer les frais de justice des vandales arrêtés en flagrant délit. Parce que c'était dans l'air du temps et parce que le président était alors Donald Trump. Peu importe qui souffrait du moment que le chaos empétrait sa présidence.

Devenue vice-président, elle s’est vue confier, en mars 2021, la tâche de sécuriser la frontière sud et remonter « aux racines » (« root causes ») de l’immigration pour solutionner le problème. En août 2024, soit trois ans et demi plus tard, la frontière sud est une passoire. L’immigration sauvage de masse continue menaçant la sécurité intérieure, les services sociaux, les finances des grandes villes et déversant un flot de drogue sans précédent dans le pays.  Comment pourrait-il en être autrement ? Kamala Harris est une internationaliste qui rejette l’idée même de « frontières ». Pour elle « sécuriser » la frontière signifie s’assurer que quiconque veut la franchir, peut le faire en toute sécurité, et est accueilli avec bienveillance de l’autre côté. C’est-à-dire avec un chemin vers la citoyenneté et sur ce chemin de l’argent liquide, un téléphone portable, une carte de crédit et une garantie d’assurance santé…  Des choses que des milliers d’Américains ne peuvent pas s’offrir !

-Sur la  santé, Harris souhaite toujours parvenir à un système de payeur unique, c’est  à dire, substituer l’Etat aux assurances privées. Une revendication à laquelle même Barack Obama avait fini par renoncer, face au rejet qu’elle suscitait dans l’opinion. Pour lutter contre le prix élevé des soins de santé, Kamala a suggéré d’imposer des plafonds aux prix des médicaments. Ces deux recommandations auront pour conséquence de limiter l’accès aux soins et de limiter l’introduction de nouveaux médicaments.

En tant que vice-présidente et donc présidente du Sénat, Kamala Harris a apporté le vote décisif à trente-trois textes de lois. Plus que n’importe quel autre vice-président. Pour l’essentiel il s’agit de nominations de fonctionnaires nécessitant une confirmation de la part du Sénat. Mais il y a également les deux textes de loi qui définissent l’administration Biden-Harris : le « American Rescue Plan » de mars 2021 et « l’Inflation Reduction Act » d’ août 2022. Ces deux textes de lois ont injecté plusieurs milliers de milliards de dollars dans l’économie américaine, sous forme d’allocations pour compenser les pertes engendrées par le Covid, et de subventions aux énergies vertes ensuite. Ce sont les deux textes de lois qui ont le plus contribué à relancer et entretenir l’inflation aux Etats-Unis, ainsi qu’à augmenter le déficit budgétaire et alourdir encore la dette.

Or Kamala Harris propose aujourd’hui de lutter contre l’inflation, non pas en prenantl le problème à la source, mais en imposant un contrôle des prix et en créant une nouvelle bureaucratie chargée d'en vérifier l'application et d’imposer des sanctions en cas de dépassement. C’est une recette qui n’a rien d’original et qui a même été essayée aux Etats-Unis en 1971 par le président Nixon, qui l’avait abandonnée au bout de trois mois. Elle n’a aucun effet sur les causes de l’inflation et conduit systématiquement à des pénuries. Cela s’est vu au Venezuela, au Chili et à Cuba à chaque fois que cela a été essayé.

Pour aider les jeunes ménages a acheter leur premier logement, Harris propose de leur avancer vingt-cinq mille dollars, soit le montant de l’apport personnel. C’est une mesure inflationniste qui ne résoudra pas le déficit de logements abordables que les Etats-Unis connaissent actuellement.

 Pour trouver l’argent, Kamala envisage  de « faire payer le grand capital » en relevant le taux de l’impôt sur les sociétés. Il passerait de 21% à 28%. Pour rappel il était de 35% sous Obama et c’est le président Trump qui l’avait abaissé, en même temps qu’il avait abaissé les taux d’impôt sur le revenu des ménages. Ces mesures avaient encouragé l’activité économique, favorisé la croissance, et augmenté les revenus fiscaux car certaines sociétés avaient rapatrié leur siège social aux Etats-Unis. Une hausse de l’impôt sur les sociétés a toujours pour conséquence, une fuite des entreprises, un ralentissement de l’activité, donc une hausse du chômage, et une baisse des salaires, les entreprises récupérant l’argent là où elles le peuvent…

Autrement dit, les prescriptions économiques présentées par Kamala Harris avant la Convention nationale, pénaliseraient l’économie américaine plus qu’elles ne l’aideraient. Elles ont été sévèrement critiquées dans tous les médias, même ceux de gauche, et qualifiées « d’analphabétisme économique ». C’est sans doute la raison pour laquelle il en a été très peu question à Chicago.

Les Démocrates ont préféré garder leurs distances avec la réalité et les propositions concrètes, et privilégier « les vibrations », l’émotion et le sentiment retrouvé que la victoire est possible et que, dès lors, tout peut en découler…Cela s’appelle vendre de l’espoir !

L’espoir est ce que les Démocrates vendent le plus souvent aux élections présidentielles. Bill Clinton venait d’une petite ville de l’Arkansas appelée « Hope », l’espoir. Barack Obama fit de l’espoir son slogan. Cette fois Kamala Harris est marketée comme la candidate de « l’espoir et de la joie » (Hope and Joy).

Et tout cela a très bien fonctionné. Les cloportes découragés qui entouraient Joe Biden, se sont métamorphosés en stratèges visionnaires décidés à conserver, à défaut de reprendre, la Maison Blanche.

Si elle est battue, les sourires disparaitront. Mais même si elle l’emporte, la joie ne durera pas et l’espoir sera déçu. Parce que ses prescriptions économiques ne feront qu’aggraver la situation difficile que les Etats-Unis vivent actuellement. Cette situation est elle-même le résultat des politiques mises en place à partir du 20 janvier 2021 et dont elle est au moins co-responsable. Le mérite des Démocrates a été de cacher cet héritage et cette responsabilité durant la convention de Chicago. Mais la fête est finie. Ils vont devoir descendre de leur petit nuage. Le défi des Républicains est de s’assurer que tous les Américains ont conscience de la réalité et des perspectives.

 

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