Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
France-Amérique le blog de Gérald Olivier
30 octobre 2024

Le duel du 5 novembre ou les Chemins de la Maison Blanche

« Une étroite et écrasante victoire» ! C’est par cette expression paradoxale que les médias américains décrivent désormais l’issue attendue de l’élection présidentielle  dont le scrutin se tiendra le 5 novembre. La victoire serait celle de Donald Trump. Elle serait « étroite » au vote populaire, c’est-à-dire au décompte de l’ensemble des suffrages. Mais elle serait « écrasante » au sein du Collège électoral, où Donald Trump pourrait passer la barre des trois cents « grands électeurs », alors qu’il en suffit de deux cent soixante-dix pour l’emporter.

Bien sûr tout ceci est au conditionnel. Rien n’est acquis. Il s’agit de simples projections à partir des derniers sondages. Ceux-ci sont favorables à Trump mais l’écart entre les deux candidats, lui-même et Kamala Harris, est très faible. Toutefois les premiers bulletins déposés dans les urnes confirment cet avantage. Le vote a déjà débuté dans de nombreux Etats, où il est autorisé de voter en avance, et comme les électeurs américains se déclarent - Républicains, Démocrates ou Indépendants - lors de leur inscription sur les listes électorales, il est aisé de savoir quel camp a le plus mobilisé ses électeurs. Or à moins d'une semaine du scrutin les Républicains ont un avantage considérable sur les Démocrates dans ce domaine.

Au-delà de cette mobilisation, l’élection se jouera encore une fois, comme en 2016 et en 2024, dans les fameux « swing states » (« Etats décisifs » ou « Etats bascules » en français) et peut-être même dans un seul, la Pennsylvanie. Ces Etats sont aussi parfois décrits comme des Etats « violets » (« purple states »), parce que le violet est la couleur issue d'un mélange de rouge, la couleur des Républicains, et de bleu, la couleur des Démocrates !

Avant d’expliquer tout cela dans le détail, un rappel de comment s’est déroulée la campagne et de comment on en est arrivé là s’impose.

Tout au long du printemps les Américains se sont préparés à une revanche de 2020. L’élection présidentielle de 2024 allait opposer l’ancien président Donald Trump, qui a survolé les élections primaires républicaines, au président sortant Joe Biden, qui postulait à un second mandat et se présentait sans opposition véritable. Plus de quinze millions d’électeurs démocrates avaient participé aux primaires pour le désigner.  

Un coup de théâtre est survenu le 21 juillet avec l’annonce du retrait de Joe Biden. A l’occasion d’une brève allocution depuis le bureau ovale de la Maison Blanche, le président a indiqué qu’il renonçait à poursuivre sa campagne pour « passer le flambeau à une nouvelle génération ». Il invitait ses électeurs à soutenir désormais sa vice-présidente et colistière, Kamala Harris.

L’annonce était sans précédent. Jamais un président sortant n’avait renoncé aussi tard dans la saison électorale. Le dernier à avoir été contraint de se retirer était le président Lyndon Johnson, en 1968, et il avait pris sa décision en mars, au début des primaires, pas en juillet, à la fin. En 1968 Johnson avait payé le prix des mensonges de son administration sur la conduite de la guerre du Vietnam. Cette fois Biden payait pour un déclin cognitif devenu  indéniable et la perspective d’une lourde défaite entrainant l’ensemble du camp démocrate dans l’abîme.

Ses apparitions publiques, déjà rares, étaient devenue embarrassantes. Son énonciation était devenue de la bouillie. Biden était incapable d’une pensée articulée. Il se trompait sur l’identité de ses interlocuteurs, confondant Zelenski avec Poutine, Macron avec Mitterrand… Sa campagne battait de l’aile. Fin juin, sa performance désastreuse lors d’un débat télévisé avec Donald Trump avait suscité une vague d’opposition au sein de son propre camp et des appels à son retrait volontaire. Critiqué par les médias, délaissé par les élus démocrates du Congrès et abandonné par les donateurs qui refusaient de financer une campagne vouée à l’échec, Biden avait fini par tirer sa révérence. A contrecœur, il avait placé l’intérêt du parti, avant son ambition personnelle, et consenti à passer la main.

Instantanément tout l’appareil démocrate, et ses soutiens dans les médias, s’étaient ralliés à la candidature de Kamala Harris. Vice-présidente invisible et sans aucun accomplissement à son actif en trois ans de présence dans l’aile ouest de la Maison Blanche, elle était tout d’un coup devenue la candidate du changement et de l’avenir. En quelques jours sa côte dans les sondages avait rattrapé et dépassé celle de Donald Trump.

Cette lune de miel médiatique allait durer jusqu’à la convention démocrate, organisée à la mi-août à Chicago, où elle était intronisée dans la « joie » promettant aux Américains de « tourner la page » et de construire une « économie d’opportunités ».

Pendant ce temps, Donald Trump et les Républicains semblaient à la recherche d’un second souffle. Ayant survécu, par miracle, à une tentative d’assassinat, début juillet, Donald Trump avis pris, aux yeux de ses supporters, la dimension d’un véritable Messie. Ils le voyaient désormais comme un homme protégé de Dieu ayant un destin à accomplir et ce destin était de sauver l’Amérique ! Malgré cette ferveur, le ticket Républicain peinait à convaincre au-delà du cercles des adulateurs.

Le rapport de force a commencé à évoluer à partir du début septembre, à soixante jours du scrutin, quand la véritable campagne a commencé. Donald Trump a multiplié les discours, les interviews, les déplacements publics, les rencontres avec les électeurs et les interviews avec les journalistes, y compris de médias hostiles à lui-même et à sa cause. Il n’a cessé d’offrir des propositions concrètes pour aider à redresser les Etats-Unis : arrêt de toute immigration clandestine ; expulsion des clandestins coupables de crimes, baisses d’impôts sur les sociétés et les ménages ; relance de la production d’énergies fossiles ; allègement des diverses règlementations pour les entreprises ; hausse des tarifs douaniers sur les produits importés de Chine ou d’ailleurs ; promesse de mettre un terme à la guerre en Ukraine ; soutien inconditionnel à Israël dans sa lutte contre l’Iran et ses suppôts, le Hamas, le Hezbollah et les Houthis, etc.

De son côté Kamala Harris s’est avérée incapable d’expliquer ce qu’était une « économie d’opportunités ». Elle s’est contentée de répéter des phrases toutes faites. Elle a d’abord évité la presse. Menant presque une campagne d’invisibilité. Quand elle a fini par accorder des interviews, elle la ignoré les questions des journalistes pour réciter des formules évasives apprises par cœur et parlant plutôt d’elle que de l’Amérique. Quand on l’interrogeait sur ses remèdes contre l‘inflation, elle commençait sa réponse par « Je viens d’une famille de la classe moyenne …» puis se lançait dans un propos verbeux et incompréhensible qualifié par les médias de « salade verbale ».

Elle a aussi pris des positions et énoncé des propositions à l’inverse de ce qu’elle avait toujours défendu. Jadis favorable à l’abolition des frontières, elle promettait de lutter contre l’immigration clandestine. Jadis opposée à la fracturation hydraulique et la production de gaz naturel, elle promettait désormais de protéger ces secteurs. Jadis favorable à ne plus financer les services de police elle promettait désormais de les renforcer. Jadis favorable à une assurance santé universelle, elle affirmait avoir renoncé à cet objectif. Et ainsi de suite.

Tandis qu’elle affirmait « ne pas être Joe Biden », elle reconnaissait qu’il n’y avait rien qu’elle aurait fait différemment si elle avait été à sa place. Quand on lui demandait sa première priorité une fois élue, elle était incapable d’en citer une seule…

Surtout, alors qu’elle proposait de « tourner la page » - à l’évidence celle de Trump – elle ne parlait que de son adversaire l’affublant des pires qualificatifs, dont celui de dictateur et d’Hitler et le dénonçant comme « une menace contre la démocratie ». Elle qui prétendait incarner l’avenir semblait obsédée par le passé récent et en particulier les incidents de janvier 2021.   

Les Américains se sont retrouvés face à un ancien président pénétré d’authenticité, soucieux de redresser le pays, et qui leur parlait de l’avenir et une vice-présidente en place insaisissable, indéfinissable, incapable d’exprimer sa vision de l’Amérique du futur, et comme exclusivement motivée par une haine contre Trump et du mépris pour ses partisans.

A fil des jours, la cote de Donald Trump a remonté dans les sondages et celle de Kamala Harris est repartie à la baisse.

Les Américains restant divisés et polarisés, l’écart dans les intentions de vote reste très faible. Tous deux sont pratiquement à égalité à 48%. Toutefois les observateurs s’accordent depuis plusieurs semaines à reconnaître que l’élan électoral est du côté des Républicains. L’enthousiasme des supporters de Donald Trump est sans égal et la « joie » a disparu de la campagne démocrate. Trump a conclu sa campagne par une soirée enthousiasmante au Madison Square Garden de New York et un discours plein d’espoir pour l’Amérique. Harris a conclu la sienne à Washington par un discours de haine contre son opposant.

Au soir du 5 novembre prochain il faut s’attendre à ce que Donald Trump et Kamala Harris fassent le plein des votes de leur camp respectif.

Toutefois l’élection présidentielle américaine ne se joue pas au simple décompte des suffrages. Elle passe par le Collège électoral et les grands électeurs de chaque Etat. Il y en  a en tout 538 (autant que de Représentants à la Chambre (435) et de Sénateurs (100), plus trois pour la capitale, Washington D.C.). Il faut en obtenir au moins 270 pour être élu. Indépendamment du résultat du vote populaire. Et il est arrivé récemment que le vainqueur du vote populaire, ne soit pas le président élu. Ce fut le cas pour  Al Gore en 2000 et Hillary Clinton en 2016. Ainsi le veut le système électoral américain.

Cette année donc Kamala Harris devrait arriver en tête dans les Etats suivants, indiqués ici avec leur quota de grands électeurs: Hawaï (4),  Californie (54) , Colorado (10 ) Connecticut (7), Delaware (3) Illinois (19), Maine (4), Maryland (10), Massachussetts (11) , Minnesota (10), New Jersey (14), New York (28) , Nouveau Mexique (5) , New Hampshire (4), Oregon (8), Rhodes Island (4) ; Virginie  (13), Vermont (3) , Washington (12) , et Washington D.C. (3). Soit un total de 226 grands électeurs.

De son côté Donald Trump devrait remporter l’Alabama (9), l’Alaska (3)),l’Arkansas (6),  la Caroline du Sud (9), le Dakota du nord (3), le Dakota du sud (3), la Floride (30), l’Idaho (4), l’Indiana (11), l’Iowa (6), le Kansas (6),  le Kentucky (8),  la Louisiane (8), le Missouri (10), le Mississippi (6), le Montana (4), le Nebraska (5), l’Ohio (17), l’Oklahoma (7) ,le Tennessee (11),  le Texas (38), l’Utah (6), la Virginie de l’ouest (4), le Wyoming (3),  Pour un total de 219 grands électeurs.

Petites subtilités le Maine et le Nebraska n’attribuent pas tous leurs grands électeurs au seul vainqueur. Trump pourrait perdre un grand électeur dans le Nebraska, mais en gagner un dans le Maine. Equation à somme nulle.

Il restera dès lors 93 grands électeurs à attribuer à partir de sept Etats : Arizona (11), Caroline du Nord (16), Géorgie (16), Michigan (15), Nevada (6), Pennsylvanie (19) et Wisconsin (10).

Kamala Harris doit remporter au moins 44 de ces grands électeurs pour l’emporter alors qu’il en faut 51 à Donald Trump. La tâche paraît donc plus ardue pour le candidat Républicain. Toutefois les sondages lui sont très favorables dans trois de ces sept Etats : l’Arizona, la Géorgie, et la Caroline du Nord. Il y possède entre 1 et 2,5 points d’avance. Ce qui est minuscule et inférieur à la marge d’erreur habituelle des sondages, mais constitue néanmoins un avantage. Si Trump remportait ces trois Etats sont total au  Collège électoral passerait à 262. Il ne lui manquerait plus que 8 grands électeurs pour l’emporter.

Emporter le Nevada ne suffirait pas. Cela porterait son total à seulement 268. Il lui manquerait encore deux voix. Il aurait nécessairement besoin de l’un des trois Etats du Midwest : le Wisconsin, le Michigan ou la Pennsylvanie. Il avait remporté ces trois Etats en 2016 contre Hillary Clinton,  ce qui lui avait ouvert le chemin de la Maison Blanche. Mais il les a perdus tous les trois en 2020 contre Joe Biden.

Cette fois il n’a pas besoin des trois. Un seul lui suffirait pour l’emporter.

Au contraire, Kamala Harris devra emporter ces trois Etats pour atteindre la barre des 270 et être élue. Pour elle le chemin de la Maison Blanche passe par le Midwest. Elle peut perdre dans le Sud et à l’Ouest. Si elle établit un « mur bleu », de la Pennsylvanie au Wisconsin, elle sera la 47e présidente des Etats-Unis.

Elle est en mesure de s’imposer dans le Michigan, dont la gouverneure est son amie démocrate Gretchen Whitmer. Pour le Wisconsin et la Pennsylvanie cela s’annonce plus difficile.

Le Wisconsin, située à l’ouest du Lac Michigan, et à la limite du Canada est un microcosme de l’Amérique. Il comporte des régions industrielles et d’autres rurales, une grande métropole Milwaukee, avec une forte population noire et des poches de pauvreté. Son économie est centrée aujourd’hui sur les services et l’agriculture, notamment la production laitière.  Les Républicains ont beaucoup investi dans cet Etat, tenant même leur convention à Milwaukee du 15 au 18 juillet. Impossible de prédire un vainqueur.

Reste la Pennsylvanie, cinquième Etat le plus peuplée des Etats-Unis, qui s’étend de la bordure atlantique au lac Erié et dont les deux grandes métropoles sont Philadelphie à l’ouest et Pittsburgh à l’est. C’est l’un des treize Etats fondateurs. Philadelphie, fut la première capitale fédérale, avant que la ville de Washington ne soit fondée pour remplir ce rôle. C’est un vieil Etat minier et industriel dont l’économie dépend encore largement des énergies fossiles, en particulier le gaz de schiste obtenu par fracturation hydraulique. D’où l’importance de cette question pour ses électeurs.

Avec ses « cols bleus » et ses syndicats ouvriers la Pennsylvanie est depuis les années 1930 un bastion démocrate. Sauf dans les années 1980 qui virent les fameux « Democrates pour Reagan », les victoires de candidats républicains aux élections présidentielles y sont rares. Trump avait créé une énorme surprise en prenant cet Etat à Hillary Clinton en 2016. Biden en 2020 a remis la main dessus. Mais avec une marge infime de quelques milliers de voix seulement, soit 0,2%. Le gouverneur de cet Etat, Josh Shapiro, est un démocrate. Il était même en lice pour devenir le colistier de Kamala Harris. Elle lui a préféré Tim Walz, gouverneur du Minnesota. Ce que nombre d’observateurs ont considéré comme une erreur tactique majeure. Eut-elle choisie Shapiro, il aurait été en mesure de lui apporter la Pennsylvanie sur un plateau...

Paiera-t-elle cette erreur au soir du 5 novembre ? C’est possible. Mais il est surtout possible que l’on ne le sache pas tout de suite. En 2020 la Pennsylvanie avait mis quatre jours à désigner son vainqueur. Le décompte des votes par correspondance avait donné lieu à de multiples polémiques. Ceux qui estiment que l’élection de 2020 fut « volée » à Trump pointent du doigt la Pennsylvanie (mais pas seulement). Si le résultat venait à tarder à nouveau, nul doute que cela susciterait des tensions entre Républicains et Démocrates et nuirait à nouveau à la crédibilité de l’élection avec à la clé de possibles débordements d’un côté ou de l’autre…

Nous n’en sommes pas là. Mais une victoire nette, claire, de Trump ou Harris, déclarée dès le 5 novembre au soir, serait la meilleure issue possible.

Le chemin de la Maison Blanche en 2024 passe nécessairement par la Pennsylvanie. Si Trump peut s’en passer. Kamala Harris ne le peut pas. Le duel sera vraisemblablement très serré.

Il est aussi possible, si les sondages actuels ont raison sur toute la ligne, que six ou même les sept Etats décisifs tombent dans l’escarcelle de Donald Trump, lui donnant un total de 297 grands électeurs, ou même, 312. C’est à cela que les Républicains pensent quand ils parlent d’une « étroite victoire écrasante ».

Publicité
Publicité
Commentaires
P
Quand TRUMP sera élu, et que les langues démocrates finiront un jour par se délier..., j'attends la vérité concernant : les fraudes démocrates de 2020, la manipulation démocrate du 6 janvier et le scenario de l'éviction programmée de Biden pour permettre à Harris d'être la candidate sans passer par la case des primaires.
Répondre
France-Amérique le blog de Gérald Olivier
  • L'oeil d'un Franco-Américain sur l'actualité internationale, la politique, l'économie, la société américaines, et tout ce qui touche aux États-Unis. Je défends les libertés individuelles et dénonce la pensé unique et les folies progressistes.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
France-Amérique le blog de Gérald Olivier
Visiteurs
Depuis la création 379 225
Newsletter
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Publicité
Publicité