Etats-Unis : les leçons de l’élection présidentielle - 3e partie : Un mandat pour "America First!" et le « Trumpisme »
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Donald Trump n’est pas l’unique vainqueur de l’élection du 5 novembre. Le parti Républicain a également gagné dans les deux chambres du Congrès. Et les supporters de Trump, réunis au sein du camp MAGA (Make America Great Again) ont vécu un triomphe, au-delà de leurs espérances.
Ces trois éléments combinés - Trump à la Maison Blanche, donc à la tête de l’exécutif, le Congrès, donc l’appareil législatif, aux mains des Républicains et une base galvanisée - augurent de bouleversements majeurs à Washington.
Les Américains n’ont pas simplement « élu » Donald Trump. Ils lui ont confié une mission et lui ont donné les moyens de l’accomplir. Cette mission s’articule autour de deux axes : redresser l’Amérique et assainir Washington. La bataille contre l’Etat profond est engagée…
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La victoire de Donald Trump marque le triomphe et la revanche du camp MAGA ! Ses supporters de la première heure, les plus convaincus, ceux qui n’ont jamais douté de lui sortent plus renforcés que jamais de ce scrutin. 2016 fut une heureuse et inattendue surprise pour eux. 2020 une désillusion amère et sans fin. 2024 marque un retour triomphal, une consécration, après le doute. Une victoire qui a valeur de sauvetage, car elle offre la chance tant espérée d’inverser la spirale décliniste des politiques démocrates et de littéralement sauver l’Amérique, face à ceux qui veulent la détruire.
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Comme leur héros Donald Trump, les MAGAs ont battu Kamala Harris. Mais ils ont fait bien plus. Ils ont vu leur indépendance d’esprit, leur persévérance et leur courage récompensés. Au-delà de Kamala, ils ont triomphé de l’administration Biden. Ils ont mis à jour la mauvaise foi du président et de son entourage qui n’ont cessé de les combattre depuis quatre ans. Ils sont venus à bout d’une justice à sens unique et d’un gouvernement instrumentalisé contre eux. Ils ont renvoyé les médias dominants à leurs petites coteries, celles où l’on cultive l’entre-soi et un aveuglement hautain à la réalité du monde. Ils ont cloué le bec à toute une élite culturelle qui n'a que dédain pour eux. Après des années de mépris et de harcèlement de la part des autorités morales et administratives américaines, ils ont fait triompher leur volonté de mettre l’Amérique en tête des priorités du gouvernement (« America First !) . Ils sont le cœur et le corps d’un mouvement dont Donald Trump est le champion. Un mouvement qui dépasse désormais sa propre personne et qui lui survivra, assurément.
Ce mouvement est le plus souvent nommé après son chef charismatique et les observateurs le qualifient de « trumpisme ». En fait il tient en deux expressions : « Make America Great Again », et « America First », qui illustrent son objectif, rendre sa grandeur à l’Amérique, et sa méthode, replacer l’Amérique et les Américains en tête des priorités du gouvernement. Washington s’est en effet plus préoccupé ces dernières années du sort des étrangers présents clandestinement sur le sol U.S. ou du sort des Ukrainiens face à la Russie, que du sort de ses propres citoyens face à une inflation galopante, une criminalité violente en expansion, et un trafic de drogue qui fait plusieurs centaines de milliers de morts tous les ans…
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L’idée d’« America First » allie nationalisme, souverainisme, patriotisme, industrialisme, capitalisme,. L’expression signifie à la fois « l’Amérique d’abord » et « l’ Amérique en tête ». Il s’agit de se préoccuper de l’Amérique et de ses problèmes pour en refaire le pays phare qu’elle fut au vingtième siècle.
C’est le sens de « Make America Great Again », une notion qui allie la nostalgie d’un âge d’or perdu et la foi que cet âge d’or peut renaître si l’Amérique le veut et s’en donne les moyens. Au cœur de cette notion se trouve la conviction que le déclin n’est pas une fatalité mais un choix. Au contraire d’un Barack Obama et de beaucoup d’intellectuels de gauche, qui estiment que le « moment Américain » est passé et que le pays doit désormais rentrer dans le rang, limiter ses ambitions et se contenter d’être une puissance parmi d’autres, les MAGAs estiment qu’il est dans l’ADN des Etats-Unis d’être « en tête ». Et que si les élus politiques donnent aux citoyens les moyens de mettre l’Amérique en tête, alors elle redeviendra dominante et rayonnante.
C’est une notion fondamentalement populiste. Parce qu’elle est partagée principalement par le « petit peuple » américain. Ce sont les Américains de l’intérieur du pays, les Américains sans diplômes universitaires, et avec les revenus les plus modestes, qui croient le plus à l’exceptionnalisme américain. Les élites intellectuelles et urbaines sont trop pénétrées de relativisme pour accepter une telle idée, qu’elles considèrent plutôt comme de la propagande patriotique pour entretenir une fierté nationale que les statistiques économiques ne justifient plus. Les Américains moyens, eux, y croient. C’est même leur raison de vivre. Leur fierté. Et ils en veulent aux élites non seulement de ne pas partager ce sentiment, mais, bien pire à leurs yeux, de tout faire pour le saper.
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« Make America Great Again » est un mouvement populiste parce qu’il émane du peuple et parce qu’il se caractérise par un anti-élitisme virulent. Les partisans MAGA constatent que depuis plus d’un demi-siècle, la société technocratique a confié le pouvoir aux élites – ceux que John Kennedy appelait « the best and the brightest », les meilleurs et les plus intelligents - et qu’elles ont été non seulement incapables de résoudre les problèmes de l’Amérique mais qu’elles les ont sans douté aggravés. Après un demi-siècle d’échecs, il est donc temps d’essayer autre chose.
De mêmes qu’après trois quarts de siècle à gérer les problèmes du monde, il est temps que l’Amérique se concentre sus ses propres problèmes.
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Sur le plan des relations internationales, le mouvement « America First » prône le non-interventionnisme. Ses partisans estiment que l’Amérique n’a pas à être le gendarme du monde. Elle n’a pas à s’immiscer dans tous les conflits extérieurs. Surtout si cette immixtion n’est qu’un prétexte à l’expansion de son impérialisme. Le mouvement « America First » regarde vers l’Amérique. Pas vers le reste du monde. Il n’ignore pas pour autant le reste du monde, mais il rejette l’idée de la transformer à son image (vieux rêve des néo-conservateurs) et il estime n’être ni en mesure ni en devoir de résoudre ses problèmes avant les siens.
C’est un retour à la vision des Pères Fondateurs et du premier d’entre eux George Washington. Dans son message d’adieu, après deux mandats présidentiels, en 1796, George Washington avait mis en garde ses concitoyens contre ce qu’il appelait des « alliances compliquées » (« entangling alliances »), c’est-à-dire l’implication des Etats-Unis dans des traités multiples risquant de lui faire perdre son indépendance de mouvement et surtout son indépendance d’esprit. C’est exactement ce que les partisans d’America First demandent aujourd’hui et ce que Trump entend respecter. Concrètement cela ne remet pas en cause les alliances déjà existantes, dont l’Otan, mais cela exclut l’idée de les étendre ou d’en créer de nouvelles.
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Concrètement cela signifie que Donald Trump, à compter du 20 janvier 2025, fera tout en son pouvoir pour reconstruire une Amérique forte, prospère, respectée et pacifique. C’est ce qu’il mis en avant tout au long de sa campagne. Et c’est ce qui est exprimé dans le programme du parti Républicain, un document d’une cinquantaine de page qui détaille l’action à venir de la nouvelle administration et que les médias ont consciemment ignoré… Voici ce qui est écrit dans le réambule.
« Notre Nation connaît un sérieux déclin. Notre avenir, notre identité, notre mode de vie sont aujourd’hui menacés… Aujourd’hui il nous faut à nouveau nous lever et faire appel à ce même esprit américain qui nous a permis de triompher par le passé, si nous voulons conduire cette nation vers un avenir meilleur… »
« Depuis quatre ans, l’administration Biden-Harris a infligé à notre pays une inflation galopante, une frontière poreuse, une criminalité endémique, l’insécurité pour nos enfants, un monde en conflits, le chaos et l’instabilité… Nous n’allons pas nous laisser abattre. Nous allons reconstruire notre nation, de, par et pour le peuple… Nous allons reconstruire une nation basée sur la vérité, la confiance et le bon sens… Nous allons rendre sa grandeur à l’Amérique.».
S’ensuivent vingt propositions simples, reprises et détaillées dans une dizaine de chapitres.
Voici les neuf premières propositions :
1 : sceller la frontière et stopper l’immigration clandestine ;
2 : mettre en place la plus importante opération d’expulsion de l’histoire américaine ;
3 : en finir avec l’inflation, rendre à nouveau la vie pas chère ;
4 : faire des Etats-Unis le premier producteur d’énergie au monde ;
5 : refaire de l’Amérique une superpuissance industrielle ;
6 : imposer des baisses d’impôts massives pour les travailleurs américains ;
7 : défendre la Constitution ;
8 : éviter la troisième guerre mondiale ;
9 : en finir avec l’instrumentalisation du gouvernement à des fins politiques ;
Etc
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Ces propositions ont été celles martelées par Donald Trump tout au long de la campagne présidentielle et qui dans sa bouche tenaient parfois à quelques expressions délibérément imagées :
-« Drill baby drill » (« creuse chérie creuse ») exprimait sa volonté de relancer et libérer le marché de l’énergie aux Etats-Unis ;
-« Drain the swamp » (« assécher le marais ») illustrait le besoin de faire le nettoyage à Washington pour purger le gouvernement de tous les idéologues qui détournent les dollars des contribuables au profit de leurs causes personnelles ;
-« peace thru strength » (« la paix via la force ») était le mot d’ordre d’une politique étrangère et de défense musclée, ne recherchant aucun conflit, mais capable de répondre par la force à toutes les provocations.
C’est sur ce programme que les électeurs ont voté. C’est pour le voir mis en place qu’ils ont élu Donald Trump et qu’ils lui ont donné une majorité. Ils l’ont fiat une toute connaissance de cause. A la nouvelle administration Trump et aux Républicains de ne pas décevoir à partir du 20 janvier.
A suivre: 4e partie: Virage à droite, réalignement électoral et rejet du « wokisme »