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France-Amérique le blog de Gérald Olivier
7 août 2014

Sommet de Washington: Trois jours pour l'Histoire

Washington USA-Africa Summit 4

Du 4 au  6 août dernier, près de 50 chefs d’Etats et de Gouvernements africains se sont retrouvés à Washington pour un Sommet sans précédent entre les Etats-Unis et l’Afrique. Une rencontre démesurée à l’image de l’Amérique, pays du gigantisme et première puissance économique et militaire mondiale. Si les enjeux directs du sommet étaient limités, la rencontre restera dans les annales comme une étape historique de la relation entre les Etats-Unis et le continent africain parce qu’elle a permis de définir les priorités pour les  décennies à venir et de relancer un partenariat désormais en plein renouveau. 

Washington USA-Africa Summit 1

C’était un engagement que le président Obama avait pris lors de sa tournée africaine de juin 2013 : organiser une rencontre au sommet avec l’ensemble des dirigeants du continent africain. Cet engagement a été tenu. Pendant trois jours, du 4 au 6 août, tous, ou presque tous,  les chefs d’Etat d’Afrique ont été les hôtes de la Maison Blanche, du Congrès et du Département d’Etat pour des échanges devant couvrir l’ensemble des relations entre l’Amérique et le continent africain. Jamais un sommet de cette envergure n’avait été organisé entre les Etats-Unis et les nations africaines. La rencontre était sans précédent, et par conséquent, historique.
Le thème général du sommet était  « Investir dans la prochaine génération », mais les intervenants ont fait bien plus que de parler démographie. Ils ont mis à plat tous les éléments de leur relation pour définir les grands dossiers des décennies à venir. Il ressort que le président Obama croit à l’avenir et à l’essor de l’Afrique et escompte que les Etats-Unis, partenaire « historique » naturel du continent noir, l’accompagne dans son développement, et en tire aussi profit pour son compte.

Washington USA-Africa Summit John kerry

Tous les chefs d’Etats africains n’étaient pas présents. Certains n’avaient même pas été conviés à la fête. Dès le mois de janvier, à l’aube de l’organisation du sommet, la Maison Blanche avait dressé une liste des « indésirables ». Ils étaient trois, le Zimbabwéen Robert Mugabe, le Soudanais Omar el Béchir, et l’Erythréen Isaias Afwerki. Le premier est considéré comme par les Etats-Unis comme un dictateur et son régime fait l’objet de sanctions internationales. Le second tombe sous le coup d’une inculpation par la Cour Pénale Internationale. Le troisième est accusé de soutenir le terrorisme dans la Corne de l’Afrique. Il est dans le collimateur de l’Onu et son pays n’a pas de relation diplomatique avec les Etats-Unis. Madame Zamba-Panza, présidente par intérim de la République centrafricaine n’avait pas non plus été conviée du fait de l’exclusion temporaire de la RCA de  l’Union Africaine, pour cause de conflit intérieur.

Washington USA-Africa Summit 2

Les cinquante autres pays de l’Union Africaine plus le Maroc (qui n’en est pas membre) avaient été invités et ont dépêché un représentant. Parmi eux trente-sept étaient des chefs d’Etat. Madame Ellen Johnson Surleaf, présidente du Libéria et Monsieur Ernest Bai Koroma, président du Sierra Léone, se sont décommandés à la dernière minute, préférant rester chez eux pour combattre l’épidémie d’Ebola. Ils furent remplacés respectivement par le vice-président et le ministre des affaires étrangères.
Les principaux pays de  l’Afrique francophone avaient salué  l’importance du rendez-vous, en dépêchant une délégation officielle conséquente, emmenée par le président. Doyen des chefs d’Etat africains Paul Biya a fait le déplacement pour le Cameroun, tout comme Ali Bongo Ondimba pour le Gabon, Denis Sassou Nguesso pour le Congo, Joseph Kabila pour le RD Congo, Blaise Compaoré pour le Burkina Faso, Faure Gnassingbé pour le Togo, Beni Yayi pour le Bénin et Macky Sall pour le Sénégal. Pour la Côte d’Ivoire c’est le Premier ministre Daniel Kablan Duncan qui avait fait le déplacement. Présidente de la commission de l'UA, madame Nkosazana Dlamini-Zuma, avait été invitée et s’est rendue à Washington pour l’occasion.

Washington USA-Africa Summit Paul & Chantal Biya 2

La rencontre s’est déroulée en trois temps. Un rendez-vous avec les élus du Congrès et des conférences thématiques sur l’énergie, les échanges, la paix  et la sécurité, la santé,  la jeunesse, etc, le lundi 4 août ;  un forum des affaires avec les dirigeants des plus grandes entreprises américaines le mardi 5, puis une rencontre avec le président Obama le mercredi 6. Homme de tous les rendez-vous, le secrétaire d’Etat John Kerry a pour sa part multiplié les discussions bilatérales avec les dirigeants africains. Il avait également mobilisé l’ensemble de son équipe pour aborder au plus près certaines questions régionales spécifiques. De son côté Michelle Obama a reçu les épouses des chefs d’Etat à l’occasion d’un symposium sur la place des femmes dans la société.

Washington USA-Africa Summit John kerry 2


Question mondanités, le point d’orgue fut un diner à la Maison Blanche le 5 août,  auquel étaient conviés les dirigeants et leurs épouses ou compagnes. Au menu, une soupe froide épicée à la tomate et au coriandre avec une galette de farine de pois chiche et du bœuf braisé avec des bananes plantains, une sauce chermoula et du lait de coco. Pour le dessert,  un gâteau au chocolat avec de la vanille de Madagascar. Ainsi l’Afrique dans toute sa diversité était présente jusque dans les assiettes de la Maison Blanche. Les vins étaient quant à eux exclusivement américains: un sauvignon blanc et  un pinot noir de Californie, et un vin pétillant de Virginie. La note musicale était fournie par le chanteur noir Lionel Richie dont la carrière recouvre plusieurs décennies et tous les styles de musique américaine, du « blues » au « disco » en passant par le « country ».

Washington USA-Africa Summit White house dinner

Pour la seule journée de lundi, 80 conférences étaient organisées, sur des thèmes touchant à la société civile et aux grandes questions internationales. En plus des invités africains, la Maison blanche avait convié les anciens présidents George W Bush et Bill Clinton, ainsi que les Premières Dames pour débattre de la question féminine et de l’éducation des jeunes filles en Afrique. Tous les débats se sont déroulés « à guichet fermé », devant des  salles combles. Premier élément illustrant le succès populaire de l’évènement. Car, et c’est le plus important pour une rencontre sans précédent, l’évènement a attiré beaucoup de monde.

Washington USA-Africa Summit 5

Sur la forme, et sur le fond, le « Sommet des Leaders USA-Afrique »fut un succès retentissant. Pendant trois jours la capitale fédérale américaine vécut au rythme des cortèges officiels, mais il n’y eut ni couac, ni incident diplomatique. Malgré le fait que le sommet soit organisé en plein mois d’août, quand le Congrès américain est en vacances, et la moiteur de Washington irrespirable, et malgré le fait qu’aucun des dirigeants invités n’ait été convié à un entretien en tête à tête avec le président Obama, (ce dont ils avaient été prévenus) tous ou presque ont répondu présent à son appel,
Le bilan comptable de l’évènement est limité. Trente-sept milliards de dollars de contrats et investissements évoqués. Chiffre modeste par rapport à des grand-messes comparables où les contrats et promesses d’accord atteignent des centaines de milliards. Côté argent privé, dix-sept milliards de dollars d’investissements ont été évoqués. Côté argent public, la Maison Blanche a parlé de vingt milliards destinés à l’Afrique sub-saharienne et annoncé qu’elle allait consacrer trois cents millions de dollars par an, pour les années à venir, dans le cadre de son initiative « Power Africa » visant à doubler l’accès à l’énergie sur le continent.

Washington USA-Africa Summit 6

Toutefois plus que sur les chiffres, ce sommet devait servir à commencer de combler le retard de l’Amérique  dans ses relations avec l’Afrique. Les rencontres au sommet entre l’Afrique et l’Europe ou l’Afrique et la Chine existent depuis plus de quinze ans. Le volume des échanges entre la Chine et l’Afrique est de deux cent milliards de dollars par an. Contre seulement 85 milliards de dollars pour les échanges entre l’Afrique et les Etats-Unis. Moins de la moitié. Toutefois le président Obama a tenu à se démarquer de l’approche chinoise qu’il n’a pas manqué de critiquer : « Nous ne nous intéressons pas à l’Afrique uniquement pour ses ressources naturelles… Nous nous y intéressons pour sa plus grande ressource, son peuple, le talent et le potentiel, de ses habitants…. Mon conseil aux leaders africains est de bien regarder ce que leur proposent les chinois, et de s’assurer que les routes qu’ils se proposent de construire mènent bien quelque part et pas seulement de la mine au port où attend un bateau chinois pour Shanghaï… »

Washington USA-Africa Summit Barack Obama

Lors de son entrée à la Maison Blanche, en 2009,  le président Obama avait institué un « virage vers l’Asie », désignant cette partie du monde comme terre d’avenir économique, à l’exclusion de l’Europe et de l’Afrique. Or aujourd’hui parmi les dix pays avec la plus forte croissance dans le monde, six sont africains. « L’Afrique poursuit sa route sur le chemin du développement et offre d’énormes opportunités, l’objectif de ce sommet est d’envoyer un signal clair indiquant que les Etats-Unis vont considérablement augmenter leur engagement en Afrique » avait indiqué Ben Rhodes, le vice-conseiller à la Sécurité Nationale en aval du sommet. Comme l’a souligné également Michael Bloomberg, l’un des organisateurs du forum des affaires du mardi 5 « il faut expliquer aux Américains tous les avantages que présentent les échanges avec l’Afrique ».

Washington USA-Africa Summit Michelle Obama

Pour l’instant les investissements américains se concentrent sur quelques pays, comme le Nigéria, l’Afrique du Sud et l’Angola, et se focalisent sur le secteur des hydrocarbures. Sur l’ensemble des capitaux américains investis dans le monde, moins de 1% le sont en Afrique.
Le potentiel de développement est donc énorme et proportionnel au retard accumulé.

Le sommet visait aussi à briser le stéréotype d’une Afrique misérabiliste, instable et simple réserve de matières premières. « L’Afrique n’est plus le lieu qui subit des crises humanitaires en cascade. Selon les projections dans cinquante ou soixante années, l’Afrique sera le continent le plus peuplé du monde, et cela implique d’immenses marchés, » a rappelé John Campbell, ancien ambassadeur américain au Nigeria et membre du Council on Foreign Relations.

Washington USA-Africa Summit 3

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