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France-Amérique le blog de Gérald Olivier
1 février 2016

Atlantico : Ce que les médias ne comprennent pas dans le phénomène Trump !

Donald Trump for president 2016

Le site Atlantico.fr vient de m'interroger sur Donald Trump, Bernie Sanders et l’humeur de l’électorat américain. Voici ce que je leur ai confié. Vous pouvez retrouver l ‘ensemble de l’interview sur le site d'Atlantico.fr : http://www.atlantico.fr/decryptage/trump-en-tete-chez-moderes-que-avons-pas-compris-vote-trump-gerald-olivier-pascal-emmanuel-gobry-2569782.html

1/ Différents sondages publiés ces derniers jours aux Etats-Unis révèlent que Donald Trump est le grand favori des Républicains modérés. Cela doit-il modifier la perception française d'un Donald Trump candidat d'une droite "extrême" américaine ?

Question 1 : Votre question est double. Elle touche à la popularité de Trump aux Etats-Unis et à la perception du personnage en France. Deux choses différentes. Quoi qu’aient pu en dire les médias français, Trump n’a jamais été le représentant d’une « droite extrême » et encore moins d’une « extrême droite » à la française. Trump est d’abord un populiste. C’est un candidat aux idées simples, voire simplistes. Interdire l’entrée des Etats-Unis à tous les musulmans est radical mais impossible à mettre en application. C’est pourquoi je parle d’idées simplistes. C’est aussi un pragmatiste, surtout pas un idéologue. Ce qui est « extrême » chez lui est son comportement, son vocabulaire, son manque de respect pour ses rivaux, et son dédain pour le reste du monde… quant à ses idées, elles sont moins extrêmes que certains le disent. Même sur l’immigration, il n’est ni le seul, ni le premier, à vouloir construire un mur le long de la frontière mexicaine. C’est pour cela que sa candidature rencontre un écho chez les « modérés ». Trump est le candidat de la petite bourgeoisie blanche américaine déclassée par la mondialisation et bâillonnée par le politiquement correct. Parmi eux, il n’y a pas que des Républicains Il y a aussi des Démocrates et des Indépendants… Toutefois pour l’instant il ne s’agit que d’intentions de vote, et les sondages sont particulièrement peu fiables aux Etats-Unis. Le vote de l’Iowa offrira la première information fiable sur l’étendue du phénomène Trump.

Donald Trump for president 2016

Question 2 2/ Comment expliquer que la majorité des commentateurs semblent avoir, tout au long de cette campagne, sous-estimés le potentiel de la candidature Trump chez les modérés ? Qu'est-ce qui, selon vous, n'a pas été compris dans l'offre politique de Donald Trump qui a permis de séduire la part modérée de l’électorat républicain ?

Encore une fois l’opposition entre « modérés » et « extrémistes » relève d’une lecture « franco-française » de cette campagne. La distinction évoquée par les médias américains est plutôt une opposition entre « l’establishment » et la « base », ou une opposition de classe, d’instruction et de statut entre la petite classe moyenne blanche, celle des banlieues et des bourgades rurales, et les élites urbaines, entre des gens ayant fait des études universitaires (anti-Trump) et ceux qui n’en n’ont pas fait ( pro-Trump). Au sein du parti républicain la distinction qui prévaut est celle entre « modérés » et « conservateurs ». La division se fait autour de questions de société clivantes comme le mariage homosexuel, l’avortement, le créationnisme, l’éducation, la justice etc. Or Trump ne se prononce pas sur ses sujets. Sur son site web, son programme se limite actuellement à 5 points – relations commerciales avec la Chine, législation sur les armes à feu, réforme de l’administration des anciens combattants, réforme fiscale et réforme de l’immigration. Rien sur les fameuses questions de société. Trump a un slogan « Make America Great Again », (Rendre sa grandeur à l’Amérique) mais il n’a pas encore de vrai programme. Par contre ce que les médias ont peut-être manqué et qui explique sa durabilité, c’est qu’un certain nombre d’Américains le pensent capable de redresser l’économie. Lors des élections présidentielles américaines le sujet numéro un, quelles que soient les époques, c’est toujours l’économie. Souvenez-vous de Bill Clinton en 1992 et son « It’s the economy stupid » (« c’est l’économie, idiot », une expression illustrant que la question évidemment la plus importante était l’économie). Or si l’économie américaine va mieux, elle ne va pas encore bien. Trump est un multimilliardaire qui a fait fortune dans le bâtiment, l’hôtellerie et les casinos. C’est un « bâtisseur » si on veut donner un éclairage favorable à son CV. Pas mal d’électeurs américains considèrent qu’il pourrait appliquer son savoir-faire à l’économie. Ce sentiment n’est pas exclusif aux électeurs du parti républicain. Les déclassés de la mondialisation sont nombreux à s’identifier comme démocrates. Or Trump, dans ses meetings de campagne, propose à des millions d’Américains moyens de retrouver le travail, et le niveau de vie qu’ils avaient avant la pagaille apportée par la mondialisation. Beaucoup sont, à l’évidence, sensibles à ce message. Et s’il s’avérait que ce discours séduise durablement et au-delà des électeurs républicains, alors la candidature Trump prendrait une dimension encore plus grande. On n’en est pas encore là…

Donald Trump Make America Great Again

Question 3 3/ Le succès inattendu de Bernie Sanders dans les sondages procède-t-il de la même logique ? Les électeurs, de droite comme de gauche, semblent en effet à la recherche d'un discours "différent", souvent plus radical. Que révèle ce constat de la société américaine ?

Le cas de Bernie Sanders est plus classique, mais révèle aussi la montée d’un populisme de gauche. Il y a traditionnellement dans les primaires démocrates des candidats a tendance « libertaire-pacifiste », qui proviennent de l’aile gauche du parti et proposent un modèle de démocratie sociale à l’Européenne. Ce fut le cas d’ Howard Dean en 2004, de Jerry Brown en 1992, ou d’ Eugene Mc Carthy dans les années 60 et 70. En général ils font le buzz quelques mois puis s’effondrent et au final rassemblent entre 5 et 10% des suffrages du parti. On les remarque peu parce qu’il y a habituellement une demi-douzaine d’autres candidats en lice. Mais cette fois personne chez les démocrates n’a osé défier Hillary. Si bien que Sanders se retrouve seul face à elle (officiellement il y a un troisième candidat, Martin O Malley, gouverneur du Maryland, mais il est totalement invisible). Comme Hillary n’est pas très bonne en campagne et qu’elle a un vrai problème de crédibilité, la côte de Sanders ne cesse de grimper. Toutefois, avec un programme qui englobe une couverture sociale universelle du berceau à la tombe, l’accès gratuit aux universités, et la baisse radicale des budgets militaires, Sanders est plus à gauche qu’aucun candidat démocrate ne l’a jamais été. Et sa popularité est révélatrice de l’évolution des électeurs américains depuis la victoire de Barack Obama. Le centre de gravité du parti s’est déplacé vers la gauche. La crise financière de 2008, l’écart croissant des revenus au sein d’une société qui se veut égalitaire et homogène, le chômage qui baisse mais les salaires qui stagnent, tous ces éléments ont engendré une défiance à l’égard de Wall Street, des banques et de la mondialisation qui profite à Bernie Sanders.

Bernie Sanders for president's platform

Question 4  On constate que Ted Cruz a pour stratégie de "doubler sur la droite" Donald Trump en essayant de rallier à lui les électeurs les plus conservateurs tentés par ce dernier. Pourtant sa stratégie semble sans succès. Qu'est-ce que Donald Trump a de plus que Ted Cruz ? Incarne-t-il mieux la personnalité hors système qu'espère une part importante de l'électorat républicain ?

Vous avez raison de dire que la stratégie de Ted Cruz est de rallier à lui les électeurs conservateurs. Par contre, comme je vous l’ai indiqué, ce ne sont pas forcément ces électeurs-là qui sont courtisés et séduits par Trump. Encore une fois, Trump n’est pas un « conservateur » au sens du terme pour l’électorat républicain américain. Par contre, on dit aux Etats-Unis que les primaires se gagnent aux extrêmes alors que l’élection générale (celle du novembre) se gagne au centre. Donc la stratégie de Ted Cruz est classique. Il ne faut pas oublier que la participation aux primaires est considérablement moins importante qu’au scrutin général. Ce sont les électeurs les plus motivés, qui sont souvent aussi les plus radicaux ou les plus conservateurs qui se déplacent pour voter…D’où la justification d’une stratégie consistant à séduire d’abord les extrêmes, comme celle de Cruz. Il me semble qu’au vu des sondages cette stratégie lui réussisse plutôt bien. Il est le numéro deux. Donc pour l’instant le mieux placé pour récupérer la mise si Trump venait à trébucher…Lors du dernier débat organisé par la chaîne Fox News le 27 janvier -le fameux débat auquel Trump a refusé de participer- Ted Cruz était placé au centre et fut la cible de toutes les attaques de ses rivaux, indication très claire de son statut de premier challenger. Reste à voir si ce statut sera confirmé dans l’Iowa et au-delà.

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