Etats-Unis, présidentielle 2020: Ce qui se cache derrière la rumeur Bloomberg
Tandis que les auditions publiques du Congrès sur l’affaire « ukrainienne » se poursuivent– sans vrai suspense puisque les Démocrates n’ont pas les votes pour faire tomber le président Trump – les chaines d’informations américaines et les réseaux sociaux sont en ébullition au sujet d’une possible candidature de Michael Bloomberg à la nomination présidentielle démocrate. Bloomberg est un milliardaire et l’ancien maire de New York. Il pourrait totalement changer la donne.
Il ne s’agit pour l’instant que de rumeurs. Bloomberg n’a pas officiellement déposé sa candidature. Par contre le remous que cette rumeur suscite en dit long sur le désarroi des Démocrates à un an du scrutin.
En effet les autorités du parti de l’âne (surnom des Démocrates) sont convaincues que parmi les candidats actuels, en dépit de leur nombre (ils sont dix-neuf depuis l’entrée en lice de Deval Patrick, ex gouverneur du Massachusetts) seul Joe Biden, qui fut le vice-président de Barack Obama, a une chance de battre Donald Trump. Or la campagne de Biden bat de l’aile. Il est tombé à la troisième place de beaucoup de sondages. Ses performances lors les débats télévisés ont été médiocres voire catastrophiques. Ses interviews télévisées sont incohérentes. Et il est indirectement visé par la procédure de destitution en cours d’investigation contre Donald Trump pour ses relations, et surtout celles de son fils Hunter Biden, avec l’Ukraine du temps où il était vice-président.
En clair Joe Biden est ce qu’on appelle familièrement en américain « damaged goods », un produit avarié. Il lui sera très difficile de se refaire une beauté pour l’élection et il est de plus en plus probable que les électeurs Démocrates n’en feront pas leur candidat à la Maison Blanche…
Or Joe Biden est un Démocrate modéré. Il représente le centre. Il rassemble les électeurs de bon sens, les gens raisonnables. Loin des radicaux, rassemblés derrière la jeune représentante de New York Alexandria Occasio-Cortez et de leur « green new deal », invraisemblable réforme environnementale qui tient de l’aberration écologique et de l’escroquerie intellectuelle... Mais le déroulement de la campagne des primaires ne lui est pas favorable.
Traditionnellement les primaires se gagnent aux extrêmes. Alors que l’élection présidentielle de novembre se gagne au centre. Le meilleur candidat est celui qui est capable de séduire les deux types d’électeurs. Ce n’est pas le cas de Biden, rejeté par les radicaux du parti, qui font actuellement la loi au sein du parti Démocrate et qui dominent les primaires.
A la place de Biden, c’est Elizabeth Warren qui tient désormais la corde. La sénatrice du Connecticut est régulièrement placée en tête des sondages. Elle recueille entre 20% et 30% des voix, loin devant Bernie Sanders, crédité d’entre 15% et 25% des voix, et Biden qui ne parvient plus à passer la barre des 20%. Le problème est que Warren vient de l’aile radicale du parti et qu’elle n’est pas soutenue par les électeurs modérés. Et encore moins par les Indépendants.
Ainsi, dans les principaux « Etats clés », les Etats qui ont basculé en faveur de Donald Trump en 2016 et qui seront le grand enjeu de 2020, des Etats comme le Wisconsin, la Pennsylvanie, la Floride, le Michigan, la Caroline du Nord ou l’Arizona, la candidature d’Elizabeth Warren est massivement rejetée. Un sondage effectué début novembre dans ces Etats plaçait Biden devant Trump ( de très peu mais devant quand même) dans cinq d’entre eux. Par contre ce même sondage donnait Trump vainqueur dans les six Etats dans le cas où il serait opposé à Elizabeth Warren.
Or l’objectif Démocrate n’est pas de se trouver un candidat, c’est de reconquérir la Maison Blanche en 2020. Il y va de l’intérêt vital du parti Démocrate !
Il est essentiel pour l’avenir du parti de l’âne d’empêcher la réélection de Donald Trump et d’éviter quatre nouvelles années du milliardaire populiste à la tête des Etats-Unis. Non que Trump soit un mauvais président. Au contraire ! Vu de son propre camp, c’est un excellent président. En tous cas un président qui tient ses promesses et obtient des résultats. Mais pour les Démocrates ses succès sont une véritable catastrophe. Car Trump est en train d’ébranler le système Démocrate. Il sape les fondements même de l’adhésion des Américains à ce parti.
L’Amérique de Trump connait le plein emploi et le revenu moyen annuel a progressé de cinq mille dollars en trois ans. De tels succès mettent à mal la politique sociale voulue par les Démocrates. Un emploi sûr et un salaire à la hausse valent mieux que toutes les allocations chômage et bénéfices publics.
Nombre d’électeurs appartenant aux minorités Hispaniques et Noires sont en train de reconsidérer leur allégeance politique. Une industrie nationale revigorée est le meilleur remède au déclassement et à la paupérisation de la classe ouvrière blanche à laquelle on assistait aux Etats-Unis depuis vingt-cinq ans. De nouveaux investissements étrangers sur le territoire américain sont la meilleure garantie de la pérennité de ce modèle. Des tarifs douaniers venant renflouer le trésor et renchérir le prix des produits importés sont une excellente façon de soutenir le « made in America ».
Au sein de la petite classe moyenne blanche, qui comptait nombre d’électeurs Démocrates jusqu’en 2016, Donald Trump fait désormais la quasi-unanimité.
Sur le plan du progrès social, on observe une volonté d’en revenir à des modèles familiaux plus traditionnels. Par ailleurs, Donald Trump a nommé d’ innombrables juges fédéraux conservateurs et déjà deux juges à la Cour Suprême, confortant la majorité conservatrice au sein de cette institution. Un nouveau mandat lui offrirait la possibilité de nommer un voire deux nouveaux juges ! Portant son total à quatre ! De quoi influer durablement sur les décisions de cette cour !!!
Bref, Le scénario d’une réélection de Donald Trump est catastrophique pour l’avenir des Démocrates. D’où la volonté du parti d’étudier tous les cas de figure permettant d’éviter pareille déconvenue. C’est là qu’apparaissent les rumeurs d’une candidature de Michael Bloomberg…
Michael Bloomberg est un milliardaire américain, qui s’est bâti une fortune dans les services financiers et les médias (une chaine d’information économique porte toujours son nom) et qui fut à trois reprises (de 2001 à 2013) maire de la ville de New York. Son nom est connu de nombre d’Américains, et il avait déjà été mentionné pour une possible candidature à la Maison Blanche en 2012 et 2016.
Bloomberg est un centriste. Il fut d’ailleurs élu à la mairie de New York en 2001 sous l’étiquette Républicaine. Il avait renoncé à se présenter en tant que Démocrate car il savait qu’il aurait été battu à la primaire par plus radical que lui…
Mais Michael Bloomberg est surtout quelqu’un capable de battre Donald Trump en 2020. Peut-être parce qu’il lui ressemble.
Tout comme Trump, Bloomberg est newyorkais. Mais sa renommée dépasse largement la Grande Pomme. Bloomberg est connu de l’Iowa à Davos, et il compte de nombreux amis à Hollywood.
Tout comme Trump, Bloomberg est d’abord un chef d’entreprise, un capitaine d’industrie. Banquier d’investissement dans les années 1970, Il a transformé un logiciel financier en un outil incontournable utilisé par tous les courtiers en bourses et tous les sites d’informations financières. Ce faisant il est devenu milliardaire et a monté sa propre chaine d’information financière Bloomberg TV.
Tout comme Trump, Bloomberg n’est pas un homme politique classique. Il est étranger au monde de Washington. Sa seule expérience est d’avoir été le maire de New York de 2001 à 2013. De sensibilité Démocrate, il s’est présenté en tant que Républicain, puis en tant qu’Indépendant. En fait c’est un centriste, qui partage certaines des vues de Trump notamment sur l’immigration clandestine. C’est aussi un fiscaliste conservateur qui s’est inquiété du niveau d’endettement des Etats-Unis et de la piètre gestion par Washington des deniers publics américains.
Bref Bloomberg peut attirer à lui nombre d’électeurs qui se sont tournés vers Trump. S’il obtient l’onction Démocrate, même les plus radicaux du parti se rallieront à lui pour faire barrage à Trump… La personnalité de Michael Bloomberg pourrait aussi faire de lui un ‘ « rassembleur » à une heure où l’Amérique semble plus divisée qu’au cours des cinquante dernières années. De sorte que dans la perspective d’un effondrement de la candidature Biden, Bloomberg serait pour les Démocrates un joker de taille! La seule personnalité susceptible de changer la donne…
Pour l’heure il n’a rien laissé entendre de ses intentions. Mais sa candidature à la Maison Blanche avait déjà été évoquée en 2012 et en 2016. On sait qu’il a des ambitions présidentielles. Il sera donc inévitablement à nouveau question de Michael Bloomberg d’ici le début des primaires, en février 2020, et surtout dans les semaines qui suivront. Il pourrait fort bien « sauter » les premiers scrutins et se présenter comme l’homme providentiel à l’occasion du supermardi, le 3 mars 2020.